Serbes, Croates et Bulgares : études historiques, politiques et littéraires

LA RENAISSANCE INTELLECTUELLE DE LA NATION SERBE 401

barbare Albanie », vers ces régions qui lui sont si chères: la Serbie, la Bosnie et l’Herzégovine :

Je soupirais et je versais souvent des larmes en me disant : Quand, dans ces beaux pays, aurons-nous autant d'écoles? Quand notre jeunesse pourra-t-elle s’enivrer de pareilles sciences ? Nous sommes des millions ! Les Turcs ne sont instruits que par des derviches et les chrétiens par des moines. Qu'est-ce qu'ils peuvent apprendre? Ils ne savent que cette formule : « Fais l'aumône! Donne tout ce que tu as! Et meurs de faim! Déteste et maudis tous les hommes qui ne sont pas de ta religion. » En voyant tous les livres que chaque jour on publie dans ce pays, j'étais pénétré de chagrin quand je pensais comme chez nous on crie: Apporte-nous des livres de Russie. Et alors, je me rappelais qu'en Dalmatie j'avais eu l'idée d'écrire des livres pour mon peuple.

Sous l'influence de ces idées, il se rend à Leipzig, où il y avait une Université comme à Halle et, ce qui était le plus important, une imprimerie pourvue de caractères slaves. Tout en suivant des cours de physique, il imprime un petit volume intitulé : Vie et aventures de Dmitri Obradovitch, appelé dans la vie monastique Dosithée, écrit et publié par luimême (Leipzig, 1783).

En publiant ce livre, dit-il, je poursuivais un double but. Je voulais d'abord faire voir l’inutilité des monastères dans la société; en second lieu démontrer la grande utilité de la science, qui est le seul moyen d’arracher les hommes à la superstition et de les amener à la véritable religion, à la vertu consciente.

L'année suivante, il fit paraître un petit ouvrage de morale pratique intitulé: Conseils de la saine raison, ouvrage qui fut réimprimé à Pest en 1866, et une traduction d’un sermon allemand du prédicateur Zollikofer.

Après trois années passées dans les deux villes universitaires, il se résolut à visiter la France et l'Angleterre. Il n'avait, pour entreprendre ce voyage, qu'une réserve de quatre-vingt-cinq ducats; « mais, dit-il, je n'avais été ni le premier ni le dernier à parcourir ces pays à pied ». Il gagne