Serbes, Croates et Bulgares : études historiques, politiques et littéraires

MOLIÈRE A RAGUSE 111

« Et moi je prétends que les vers de mon madrigal sont aussi bons que ceux de l’Osrnanide. »

L'Osmanide, c'est le grand poème national ragusain, le chef-d'œuvre du poète Ivan Gundulie (1588-1638).

Nous retrouvons cette allusion à l’'Osmnanide et à d’autres ouvrages de littérature indigène dans l’adaptation de a Critique de l’École des femmes. Dans la comédie de Molière le poète Lysidas, appelé à donner son avis, ne veut pas se compromettre et s'exprime en termes généraux, je dirais presque académiques : «... On m'avouera que ces sortes de comédies ne sont pas proprement des comédies et qu’il y à une grande différence de toutes ces bagatelles à la beauté des pièces sérieuses. »

Le Pero Versic, qui répond à Lysidas dans le texte slave, éprouve le besoin de citer des ouvrages nationaux encore gu'étrangers au théâtre. « Cette espèce de comédies, dit-il, ne peut pas réellement se nommer comédie, et il y a une grande différence entre ces badinages et les œuvres fortes et solides. Maintenant tout le monde donne dans ce genre et il n’y a plus d'Osmanide, plus de Trompette slave, plus d’Enfant prodigue, plus de Christiade?, on a même oublié le nom de l’Académie®?.

L'adaptateur ragusain a réduit les Femmes savantes de cinq actes à trois. On connait le sonnet à la princesse Uranie sur la fièvre. L’adaptateur le remplace par le madrigal suivant : ï

Chanson à madame Sunezaniça® qui mange des fleurs et s’en nourit.

Lorsque Sunczaniça a faim Elle méprise tous les aliments. L'amaranthe et la rose

Sont les mets qu’elle choisit.

1. Voir sur Gundulie (ou Gundulitch), l’article que j’ai consacré à ce poète dans la Grande Encyclopédie.

2. OEuvres célèbres de la littérature ragusaine au xvne siècle.

3. Sunezaniça, de Sunce : soleil, correspond à notre Eliante.