Serbes, Croates et Bulgares : études historiques, politiques et littéraires

LES ORIGINES DE LA NATION SERBE 7

qui lui apporta en dot quelques districts de la Macédoine septentrionale. Il aida son beau-frère dans les luttes contre les Tures d'Asie, sans se douter que le jour viendrait bientôt où Grecs et Serbes lutteraient en vain pour défendre la Péninsule contre les envahisseurs exotiques. Ouroch fut célèbre par sa piété et ses bonnes œuvres. Il a gardé dans le peuple serbe le titre de saint roi. La tradition serbe attache un grand intérêt aux fondations pieuses des souverains. Ainsi, le roi Étienne Ouroch HT (1321-1357) a reçu le surnom de Detchanski à cause du monastère de Detchani qu'il érigea et dont la charte de fondation nous a été conservée’. Ces monastères ont été pendant la domination turque de précieux foyers de civilisation et ont puissamment contribué à conserver les traditions nationales.

Le représentant le plus remarquable de la dynastie des Némanides fut Étienne Douchan, qui régna de 1337 à 1855. Il profita de l’anarchie qui sévissait à Byzance pour pousser en Épire, en Thessalie et jusqu’à Salonique ses armes victorieuses. Il porte dans l’histoire le surnom de Fort. En 1346, le jour de Noël, il se fit couronner tsar des Serbes et des Grecs. Ce titre n’avait pas encore été pris par les princes russes, mais il avait été porté dès le ix° siècle par les princes de Bulgarie. Au fond, si l’on s’en rapporte aux origines étymologiques, il n'était guère plus noble que celui de kral : car si tsar représente le nom de César, kral représente celui de Karl, autrement dit de Charlemagne. Tandis que Douchan guerroyait contre les Grecs, les Tures mettaient le pied sur le sol de l’Europe, s’établissaient à Gallipoli. Le nouveau tsar comprit le péril, et, si j’en crois M. Jireczek, il négocia avec le Saint-Siège pour se faire nommer « capitaine de la Chrétienté contre les envahisseurs ».

Ce qui constitue aujourd’hui le principal titre de gloire de Douchan, c’est le code qu’il promulga en 1349 et auquel

1. Ce monastère existe encore aujourd'hui. Il n’a plus que quatre ou cinq moines. Îl est situé au Sud de Petch (Ipek) dans la Vieille Serbie.