Serbes, Croates et Bulgares : études historiques, politiques et littéraires

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apparaissent seulement: une sœur qui vient pleurer son frère mort en combattant et une sorcière d’origine étrangère. Aucun épisode d'amour ne se mêle à ces tableaux austères.

Le rideau se lève sur une scène assez grandiose et qui ferait un début d'opéra. Par une belle nuit d’été, au sommet du mont Lovichen, les guerriers monténégrins se sont réunis pour délibérer sur les intérêts de la nation, puis ils se sont endormis. Tandis qu’ils sont encore plongés dans le sommeil, le vladika Daniel veille, et, n'ayant aucun interlocuteur à qui confier ses idées, il nous les révèle dans un monologue. Il évoque le souvenir des premières conquêtes musulmanes et même le nom de Charles Martel. C’est faire preuve de beaucoup d’érudition. Mais peut-être non erat hic locus. Le poète manque souvent de goût et de mesure et montre parfois un fâcheux pédantisme.

Done Le vladika se raconte à lui-même comment les pays serbes sont tombés aux mains des Osmanlis et déplore les misères de sa race. Il se sent comme un fétu de paille emporté par la tempête. Le ciel est fermé et n’entend plus ses prières. Le Monténégro résiste encore à l'invasion, mais la foi musulmane y gagne du terrain et le nombre des renégats se multiplie.

Peu à peu les guerriers s’éveillent : l’un d’entre eux essaye de relever le courage du vladika. N’a-t-il pas autour de lui cinq cents braves compagnons ? Avant que les Turcs aient réussi à les dompter, beaucoup de sang aura coulé. Ces héros, le poète se plait à nous les présenter. Ils aiment à faire parler la poudre et à écouter dans la montagne l’écho de leurs détonations.

La scène change, et nous voici à Tsettinie au milieu d’une assemblée qui s’est réunie pour régler des différends entre certains chefs de tribus. Le poète, qui a lu les tragiques grecs, probablement dans quelque traduction russe, a introduit sur la scène le chœur antique, mais il n’a pas osé lui donner ce nom; il l’appelle le kolo. Le kolo, c’est une danse grave, une sorte de ronde (kolo veut dire cercle) dan-