Serbes, Croates et Bulgares : études historiques, politiques et littéraires

LES ORIGINES DE LA NATION SERBE 9

partie catholique; au point de vue politique, elle tomba d’abord dans la sphère d'influence — comme on dit aujourd'hui — de la Croatie et, par suite, de la Hongrie. Chez les chrétiens de Bosnie, catholiques ou orthodoxes, se développa de bonne heure l'hérésie des Bogomiles, autrement dit des patarins, et l’on a prétendu que le Bosniaques musulmans descendent d’ancêtres qui ont mieux aimé embrasser le mahométisme que de rentrer dans l'Église oMcielle, — catholique ou orthodoxe. Les chefs qui gouvernaient la Bosnie, sous la tutelle des rois de Hongrie, s’appelaient bans. Le premier dont on sait le nom se nommait Boritch; le premier qui joue un rôle sérieux dans l’histoire, c’est le ban Koulin (1186-1204). C’est à lui que l’on doit le plus ancien document connu en langue sud-slave, un privilège conféré en 1189 aux Ragusains. Son nom vit encore dans les traditions populaires’; l’invasion des Tartares en Hongrie donna l’occasion aux Bosniaques de s'émanciper de la tutelle hongroise. Pendant la seconde partie du xm° siècle et la première moitié du xiv°, l’histoire de la province ne présente qu’une longue série de luttes contre les pays voisins. Les religions dominantes paraissent être le catholicisme et l’hérésie des Bogomiles. Les souverains continuent à porter le titre de bans.

Peu de temps après la mort de Douchan, au moment où son empire s’affaiblit et se morcelle, apparait en Bosnie un souverain qui semble reprendre sa tradition. Étienne Tvrdko® (1353-1391) appartenait à la dynastie des Némanides par les femmes; il réussit à mettre la main sur les asciens et, en 1377, il prit le titre de roi. Il s’appelait, en sa langue maternelle, d'un titre un peu long, roi des Serbes, de Bosnie, du littoral et des pays occidentaux. En latin, on l’appelait banus Bossine et rex Raxie. Depuis ce temps-là, la Bosnie a prétendu garder le nom de royaume. Le couronnement eut lieu, d’après la tradition, au monastère de

1. Raconter quelque chose en commençant par Koulin répond à notre locution française : remonter au déluge. 2. Prononcez Tvertko.