Serbes, Croates et Bulgares : études historiques, politiques et littéraires

10 SERBES, CROATES ET BULGARES

Milechevo‘ où reposaient les restes de saint Sava, le grand saint orthodoxe. Cette circonstance a donné lieu de croire que Tvrdko appartenait lui-même à l'orthodoxie.

Malheureusement, Tvrdko ne réussit pas à grouper autour de lui tous les pays serbes. Les Turcs avançaient sans cesse vers le Nord-Ouest. Le 15 juin 1389, ils rencontrèrent dans la plaine de Kosovo (le champ des merles) le prince Lazare, qui régnait sur les paÿs serbes du bassin de la Morava, et ses deux gendres, Vouk Brankovitch, prince de Pristina etde Prizren, un prince Georges Stratimirovitch, -de la famille qui régnait dans la Zeta, et un corps d'armée bosniaque envoyé par le roi Tvrdko. Malgré leur valeur les Serbes succombèrent; le prince Lazare fut tué et enseveli au monastère de Ravanitsa.

Cette bataille de Kosovo a donné lieu à tout un cycle épique d’une grande beauté. Les Serbes, nation poétique par excellence, se sont consolés de leur défaite en exaltant leurs héros, en les idéalisant dans de poétiques légendes. J'ai étudié autrefois le cycle épique de Marko Kralieviteh?; celui de Kosovo a été il y a bien longtemps déjà, traduit en français avec beaucoup de talent par feu le baron d'Avril. Il renferme des épisodes très poétiques”.

La vie politique de la nation serbe ne finit pas immédiatement au lendemain du désastre de Kosovo; morcelée en plusieurs groupes, elle garde encore sous la suzeraineté turque sinon l'indépendance, au moins l’autonomie. Le fils de Lazare, Étienne Lazarevitch, règne de 1389 à 1427, d’abord avec le titre de knez (prince), ensuite avec celui de despote; les petits États, au lieu de se grouper contre l’ennemi commun, gaspillent leurs forces dans des guerres intestines. La veuve de Lazare donne sa fille Olivera en mariage à Bajazet et les fils du héros de Kosovo servent dans l’armée turque à Nicopolis (1396), à Angora (1402).

1. À 5 kilomètres de Priepolie, dans la Vieille Serbie.

2. Ce travail a été reproduit en un petit volume de la Bibliothèque slave elzévirienne (Paris, Librairie Ernest Leroux, 1906).

3. Voir les traductions d’Adolphe d'Avril et de Dozon.