Serbes, Croates et Bulgares : études historiques, politiques et littéraires

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La description du siège de Bude est d’un style vif et pittoresque qui rappelle par endroits les chants épiques.

Dans la seconde moité du xvu: sièele, les écrivains bosniaques se font rares. Au début du xvm‘, Stjepan (Etienne) Margetic publie à Venise (1704), en caractères cyrilliques, un traité de la Confession qui a eu six éditions (la dernière est de 18/42), dont quatre en caractères cyrilliques et deux en caractères latins. Le livre, écrit d’un style simple et attachant est devenu tellement populaire qu’il a pris le nom de son auteur. Le peuple l’appelait Stiepanoucha (le Petit Étienne), de même que plus tard, chez les Bulgares, le Kyriakodromon ou livre du dimanche de l’évêque Sofroni est devenu le Sofronie'. L'ouvrage n’est pas d’une orthodoxie très pure; aussi a-t-il quelquefois excité les alarmes du haut clergé. L'auteur a une très haute idée de sa langue maternelle.

« La langue bosniaque, dit-il, que l’on appelle aussi illyrienne, ne peut être comparée à aucune autre, car aucune autre n'est répandue dans autant de pays; mais en maint endroit elle a été corrompue et mélangée à d'autres langues, ainsi en Bosnie au ture, sur le littoral, au latin. »

L'auteur fournit aussi des observations intéressantes sur les mœurs de son peuple à l'époque où il écrivait.

On lui doit encore un recueil de Légendes des Saints, publié à Venise en 1708 et réimprimé dans cette ville en 1770 et 1778. Il déclare avoir écrit ce livre pour le peuple. Dans la préface il recommande à ses confrères du clergé d'éviter les prédications que le peuple ne comprendrait pas.

Une figure particulièrement curieuse, c’est celle du franciscain Lovro Sitovic. Son père était un musulman qui, lors d’une expédition contre les Autrichiens, fut fait prisonnier. Pour recouvrer sa liberté, il laissa son jeune fils en otage en attendant qu'il pût acquitter sa rançon. L’enfant se fit baptiser et entra comme novice dans l’ordre des Franciscains. Outre une grammaire latine qui manquait

1. Voir plus loin l'étude sur Sofroni.