Théveneau de Morande : étude sur le XVIIIe siècle

MORANDE PEINTRE DE MŒURS. 95

qualifiaient « de très hautet puissant seigneur ». Il rappelle le bon tour que leur joua l'abbé Terray, qui ne manquait pas d'esprit, lorsqu'il imagina de faire taxer par les receveurs ceux qui se paraient de titres nobiliaires. Quant aux grands seigneurs authentiques, Morande flétrit leurs scandaleuses alliances avec des courtisanes de profession. C’est le duc de Nevers qui épouse la Quinault; le comte d’Hérouville qui s’unit à Lolotte, maitresse du comte d’Albemarle; le marquis de Moutiers à la de Varenne; le marquis de Langeac à la Sabbatin, maîtresse du duc de la Vrillière ‘; et encore le marquis s'engageait-il à ne pas troubler les plaisirs du noble duc. Cette même Sabbatin eut encore le talent de faire épouser sa fille au marquis de Chambonas; mais cette nouvelle victoire de la courtisane ne laissa pas de soulever des orages. Lorsque la mère du marquis de Chambonas alla faire part du mariage au maréchal duc de Biron, leur parent, le maréchal indigné fit monter un suisse et lui dit : « Quand Monsieur ou Madame se présen-

1. V. sur la Sabbatin l’Espion anglais, t. IL, p. 7. Le duc de la Vrillière eut d’elle cinq enfants que le marquis de Langeac reconnut comme siens en épousant la maîtresse du ministre. À cinquante ans, cette femme était encore fort belle.