Théveneau de Morande : étude sur le XVIIIe siècle

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y compris deux enfants qu'elle avait de lui. À son retour, M. de Lauraguais se signala par le plus violent désespoir. Ce fut la clémente comtesse qui arrangea les choses et fit accepter à la maîtresse délaissée de son mari un contrat de deux mille écus de rente. Elle se chargeait aussi des deux enfants. Bertin, le richissime trésorier des parties casuelles, membre par surcroît de l’Académie des belles-lettres, essaya de remplacer Lauraguais danslecœurdeSophie. maisleslargesses de Bertin ne servirent de rien. Le comte et l'actrice oublièrent leurs griefs réciproques et restaurèrent leur ménage irrégulier. Tout Paris s'occupa de ces querelles d'amoureux. Un autre adorateur de Sophie Arnould, c'est M. de Murville, son poète ordinaire, qui nous a laissé tant de dithyrambes sur elle; témoin ce couplet qui se chantait en avril 1777, vers la fin de la carrière artistique de la grande actrice :

En vain l'envie aux triples dents, Voulut blesser Sophie :

Elle répand que ses talents Semblent rose flétrie;

Mais elle parut dans Castor Si touchante et si belle

Que chacun s’écria d’accord : « C'est toujours, toujours elle! »

C'est encore lui qui avait inscrit ce quatrain