Théveneau de Morande : étude sur le XVIIIe siècle

MORANDE ET LA RÉVOLUTION. 251

magistrat, un sénateur de poids, une si bonne tête », ait pu livrer en pâture aux exagérés et aux violents une question aussi redoutable que celle de la responsabilité du roi. Il le conjure de «s'arrêter au bord du précipice, d’en fixer la profondeur. de se retirer du groupe effrayant à la tête duquel il s’est mis en scène ».

Si Morande s'élève avec énergie contre le parti républicain, il dit crûment son fait au parti aristocratique. Après avoir annoncé dans son journal que plusieurs châteaux viennent d’être brûlés par les gardes nationales et qu'il y a eu même des victimes, voici à quelles réflexions philosophiques il s’arrête : « IL peut arriver des malheurs à l’un et à l’autre parti, mais le moyen d’empécher la ci-devant noblesse d'être exterminée est de se bien persuader, ainsi que le clergé, que leur règne est passé et que l’on ne croit plus ni à la chevalerie, ni aux augures » (numéro du 10 juillet 1701). Et, un peu plus tard, il ajoute : « Les émigrans auront beau faire, le talisman est brisé; ils ne renverseront point la constitution. Tout projet de contre-révolution est en même temps une atrocitéet une folie. » Quant au clergé, Morande estime que ses prétentions outrées ont forcé PAssemblée « de faire tomber tout d'un coup tous les prestiges », ou, en termes plus clairs,