Théveneau de Morande : étude sur le XVIIIe siècle

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tentatives de chantage, seraient expulsés du territoire britannique et conduits au port le plus voisin de leur pays d'origine; en second lieu, que le libraire, agent ostensible du chantage, serait considéré comme partie principale dans l'affaire. Le projet dont il s’agit devait être distribué aux membres du Parlement anglais, parmi lesquels plusieurs seraient gagnés à prix d’or. Mais on n'achetait pas le Parlement britannique comme une édition de libelle; la cour de France put bientôtse convaincre que les Anglais n'avaient aucune envie de protéger Louis XVI et la famille royale contre les calomnies des réfugiés français.

En désespoir de cause, le ministère demanda encore une fois conseil à Morande. Le Gazetier cuirassé qui, par espièglerie pure, avait d’abord poussé le gouvernement du roi aux mesures violentes, finit par se déclarer partisan du système du laisser-faire. Cet homme qui naguère avait mis en pratique, avec un succès incroyable, l'art périlleux du chantage, adressait maintenant à M. de Vergennes ces judicieux conseils

1. Morande se vante lui-même dans la Réplique à Brissot, p. 37, d’avoir remis à M. de Moustier, ministre de France en Angleterre, un projet de bill contre les libelles et une longue note sur la manière de poursuivre les libellistes en Angleterre.