Trois amies de Chateaubriand

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134 TROIS AMIES DE CHATEAUBRIAND

s’étabhr dans le voisinage, au château de Saint-

-Brice, pour un peu de temps. Mme de:Staël vint l'y rejoindre, Cette terrible dame profitait du souci que

donnaient à Bonaparte les préparatifs de l’expédition d'Angleterre, pour se rapprocher de Paris. Mais elle se crut pourchassée et, par Mme de Genlis,

dénoncée lâchement. Elle se réfugia près de Juliette,

« cette femme si célèbre pour sa figure et dont le caractère est exprimé par sa beauté mêmet »,

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Nous n’allons pas suivre Juliette, avec tant d’assiduité, pendant les mois et les années qui viennent. Aussi bien, il ne s'agissait que de tracer un portrait de cette jeune femme et d'indiquer ce qu’elle était à l’époque où Chateaubriand la vit pour la première fois et ne s’aperçut pas d'elle. Sans doute sa mer-

veilleuse beauté aurait-elle pu l’attirer tout de suite. Mais elle régnait sur un monde plus riche et ostenta-

toire que très élégant, sur un monde qui n’était pas

du tout celui de Chateaubriand,

Et ensuite, il fallut qu’elle subît l’école du malheur

pour devenir plus intéressante, pour acquérir ce qui

manquait à son esprit de charme pénétrant et subtil, cette mélancolie, par exemple, dont l'auteur d’Atala fut infiniment curieux.

Elle montra beaucoup de bravoure et, semble-t-il,

4; Nu pe STAEL, Dix années d’exil (éd, Paul Gautier, Plon, 4902), p. 96.