Trois amies de Chateaubriand
HORTENSE ALLART 219
je vous vois, je suis faible... Cela est suivi de longs troubles. Je veux trouver en vous un appui contre vous, contre moi-même. Vous me verrez toujours ami, toujours touché; mais qu’il y ait entre nous une barrière, et que je reste en decà du serment! »
Hortense détesta cette barrière. Elle priait Sainte: Beuve de lui écrire, S'il ne lui écrivait pas, elle lisait de ses œuvres. Elle y trouvait « mille grâces, ces abeilles de l'Hymette qu’elle n'avait jamais su atteindre, disait-elle, mais que ses lèvres eussent aimé à chercher sur celles » de l’auteur.
Sainte-Beuve lui reprochaïit « d’arranger trop les choses et de penser trop à Salluste et à Corinne ». Alors, elle reprochait à Sainte-Beuve « de ne pas assez songer à Salluste et de croire que ce qui est, charmant dans un salon l’est aussi dans un livre ». Ainsi — et c’est bien agréable — Hortense accusait Sainte-Beuve de frivolité. Elle ne le trouvait pas juste pour Benjamin Constant; elle le blâmait de quelque partialité.
En 1863, il écrivait à cette dame sévère et grave : «J'ai fait un peu de mythologie chrétienne, en mon temps; elle s’est évaporée. C'était pour moi, comme le cygne de Léda, un moyen d'arriver aux belles et de filer un plus tendre amour. La jeunesse a du temps ot se sert de tout. Je suis vieux et j'ai chassé tous les nuages, Je me mortifie moins, et je vois plus juste. Îl est dommage que tout cela ne puisse durer et que le moment où on est le plus maître de soi et de sa pensée soit celui où elle est le plus près de faiblir et