Un Agent des princes pendant la Révolution : le Marquis de La Rouërie et la conjuration bretonne 1790-1793 : d'après des documents inédits

CHÉVETEL GLORIFIÉ 281

de s'en procurer, M"° de Virel regreltait amèrement les deux cents louis dont, à la Fosse-Hingant, elle s'était départie au profit de Chévetel et que celui-ci avait empochés sans vergogne. Lalligand, instruit de l'incident, s’indigna, courut chez Chévetel, lui arracha, non sans menaces, une somme de cent louis, dont les membres du Comité de Sûreté générale voulurenthien,annonça-t-il, se contenter: ilest bien probable qu’il en garda pour lui une part : en somme, cette affaire à laquelle il donnait des soins depuis si longtemps se soldait pour lui par un bénéfice minime : du moins il emportait l'estime de M" de Virel et d'Allerac, qui sortirent de prison en le bénissant et en se reprochant de l'avoir méconnu.

En arrivant en Bretagne, elles trouvèrent leur maison dévastée : leur mère était folle et gardée dans un hospice, leur père venait de mourir de désespoir à Jersey ; elles ne pouvaient demander asile à leurs cousines de Limoëlan qui, ayant ellesmêmes perdu leur père sur l’échafaud, avaient vu

1. On retrouve encore l'écho de cetteillusion dans les Mémoires de M° Roland, à laquelle les prisonnières se confiaient : « Jugées, acquittées, encore détenues et sans argent, les deux jeunes femmes se rappelérent la bourse de louis ; elles confient cette particularité à un homme probe et ferme qui se rend chez Chévetel et lui demande les 200 louis. Chévetel, surpris, nie d'abord, s'étonne de la vigueur du requérant, qui menace de le couvrir de mépris à la face de l'Univers ; il balbutie, confesse la moitié et la rend en assignats, mais après plusieurs conférences. » Mémoires de M” Roland.