Variétés révolutionnaires

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le monde à la cour. Au premier rang des mécontents il faut citer Choiseul, ministre des affaires étrangères, de la guerre et de la marine, surintendant des postes, colonel général des Suisses, toutpuissant avec sa grande fortune et ses traitements divers s'élevant à un million de livres, esprit superficiel, investi de la faveur de Louis XV, dont il abusait jusqu'à l’insolence. Ancien protégé de la Pompadour, qu'il aurait voulu remplacer par sa propre sœur la duchesse de Gramont, il croyait voir dans la Du Barry une ennemie, la créature de ses adversaires acharnés, les La Vauguyon, les Richelieu, les d'Aiguillon. Aussi ne perdit-il pas de temps pour faire attaquer la favorite. On mit en circulation de nouvelles éditions de la célèbre chanson «la Bourbonnaise » avec des allusions transparentes à la Du Barry, allusions reproduites et envenimées par plusieurs pièces jouées sur les théâtres de Nicolet et de la foire, avec approbation de la censure et du lieutenant-général de police Sartines, créature de Choiseul. Louis XV ne daigna pas s’apercevoir de ces critiques acerbesetobscènes ; il installa Mme Du Barry à Versailles, d'abord rue de l'Orangerie, ensuite au château, dans un appartement d'où on délogea Mesdames, ses filles. Une formalité manquait encore pour faire entrer de plain-pied la favorite à la cour : la présentation, exigée par le cérémonial de l'étiquette. Choiseul, en plaçant sous les yeux du roi un dossier très chargé sur le passé de Jeanne Bécu, tenta d'empêé-