Variétés révolutionnaires

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LES ORATEURS DE LA CONSTITUANTE 129

résister, provincial naïf, aux charmes d’une reine malheureuse plus âgée que lui de six ans, et à qui la médisance publique avait fait une si singulière légende. Il rêva d'être le conseiller de la cour et acheva de se perdre, d'abord en quittant le club des jacobins pour fonder celui des feuillants, ensuite en prononçant son célèbre discours sur l'inviolabilité royale. Avec sa parole élégante mais . sèche et froide, avec sa dialectique habile mais peu serrée, Barnave arrive le premier après Mirabeau, en suivant de loin l'illustre tribun ; jamais il ne dépouilla complètement la tunique de Nessus, la robe d'avocat.

Reste le petit groupe de l'extrême gauche de l'Assemblée, qui, sans faire ouvertement profession de républicanisme, attaquait à chaque occasion les principes constitutifs de la monarchie. Les plus connus de ses membres étaient Buzot, Pétion, Dubois-Crancé, Prieur de la Marne, Robespierre. Pétion n'était pas orateur, et Buzot aborda rarement la tribune de la Constituante ; mais il n’est pas sans intérêt d'examiner. les débuts de Robespierre. Personne n'eut jamais un caractère moins sympathique à ses contemporains ; une atmosphère

glaciale enveloppait le maigre avocat d'Arras et faisait le vide autour de lui. Comme le dif fort bien M. Aulard, « cet ami de l'humanité semblait nourrir contre les hommes une sombre et mystérieuse rancune ». Les historiographes (nous allions dire