Variétés révolutionnaires

LUCIEN BONAPARTE 307

frère du vainqueur d'Arcole, du héros en route pour l'Egypte, n'était déjà plus de ceux qu’on ose discuter. Lucien fut accueilli aux Cinq-Cents, où siégeait déjà Joseph, avec une certaine déférence : le nom de Bonaparte commençait à inspirer le respect et la crainte. Il soutint d'abord le gouvernement du Directoire. Ensuite, avec Joseph il passa à l’opposition à la suite des affaires de la République cisalpine, où le Directoire semblait vouloir contre-carrer les plans de Bonaparte. Les deux frères s’associèrent aux démarches du général Lahoz, envoyé à Paris pour protester au nom du gouvernement milanais. Lucien et ses amis, de concert avec Sieyès, prirent une large part à la journée du 30 prairial, révolution faite par le pouvoir législatif contre l’exécutif, qui remplaca les directeurs Treilhard, Larevellières-Liepeaux et Merlin de Douai par Gohier, Roger Ducos et le général Moulins. Mais sur toute cette période qui précède le 18 brumaire, il faut se défier des Mémoires. Cette partie a été écrite trentecinq ans après les événements, pour défendre une thèse originale mais inexacte en tous points. Le prince de Canino cherchait à se poser comme le personnage prépondérant des Cinq-Cents et à montrer qu’au moment du coup d'État la République était compromise par les agitations jacobines ; il soutenait que le général Bonaparte n’était pour rien dans les événements, qu'il était arrivé par hasard, comme un sauveur providentiel. Lucien ne dit rien