Variétés révolutionnaires

LA VRAIE DU BARRY 89 que ses historiographes malveillants, sur la foi de Mavyrobert et de Morande, veulent qu'elle aït été fille publique, thème longuement développé par les libellistes aux gages de Choiseul, afin de faire honte à Louis XV de sa passion pour une femme indigne, rebut de la prostitution.

Malheureusement pour le succès de leur thèse, Mayrobert, Choiseul, comme plus tard Soulavie, ont eu beau chercher le nom-de Jeanne sur les registres de la police, registres fort exactement tenus, ils ne l'y ont pas trouvé. Se rabattant sur la prostitution libre, les pamphlétaires ont prétendu que la favorite avait au moins servi chez la Pâris et la Gourdan. Or, Justine Pâris était morte alors que Jeanne n'avait pas dix ans. Quant à la fameuse Gourdan, quelque prix qu'on ait mis à une déclaration compromettante de sa part, même après la disgrâce de Mme Du Barry, elle nia toujours l'avoir eue comme pensionnaire, en montrant ses livres à. l'appui. Donc, Jeanne Bécu, la « belle fille à Rancçon », n'appartint jamais ni à la prostitution officielle ni à la prostitution clandestine. Pourtant, sa vie n'était pas absolument exemplaire : les bons exemples lui avaient manqué ; elle fit quelques conquêtes sous le nom de guerre de Beauvarnier, changé bientôt par inversion en celui plus euphonique mais aussi fantaisiste de Vaubernier. En 1763, elle rencontra par hasard, dans une académie de jeux, l'homme qui allait exercer une influence décisive sur sa vie, Jean Du Barry.