Correspondance diplomatique de Talleyrand. La mission de Talleyrand à Londres, en 1792 : correspondance inédite de Talleyrand avec le département des affaires étrangéres le général Biron, etc.

#02 MISSION DE TALLEYRAND

CVI CHAUVELIN AU MINISTRE

Londres, le 1% juillet 1792, l'an IV de la liberté.

Moxsreur,

L'empressement que nous avons dü mettre à vous faire parvenir la copie de la note de lord Grenville du

Europe une guerre universelle, et dont les intrigues faites auprès de la Hollande, les arrangements pris avec divers souverains d'Italie, la conduite tenue envers la Pologne, ne permettent plus de douter.

« 2 Copie de la réponse du lord Grenville, qui annonce à M. Chauvelin que S. M. Britannique ne refusera jamais de concourir au rétablissement de la paix entre les puissances de l'Europe, par les moyens compatibles avec sa dignité. Mais les motifs qui l’ont portée à ne pas s'immiscer dans les affaires intérieures de la France, doivent l'engager à rester, à l'égard des autres couronnes, dans la plus parfaite neutralité, à moins que sa médiation ne fût également désirée de part et d'autre. »

Au lendemain de la guerre de l'indépendance américaine, qui aurait dû l’éclairer sur la force des principes nouveaux, le pays du « Parlement conventionnel », qui avait prononcé la déchéance de Jacques If, se refusait à enchainer dans les liens de la reconnaissance la nouvelle France, et à prendre le rôle d’arbitre de l'Europe.

La Grande-Bretagne promettait sa neutralité : elle refusait sa médiation auprès de l'Empereur, du Roi de Prusse et des États-Généraux des Provinces-Unies, cette médiation qu'il eût été si glorieux pour elle de tenter, et qui pouvait arrêter dans ses débuts une guerre qui, sauf quelques courtes trêves, devait durer plus de vingt ans, et ne se terminer que dans les délibérations du Congrès de Vienne, sous la haute direction de Talleyrand lui-même.