Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

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Pour lui d’ailleurs Turgot est un révolutionnaire! et Necker un pur démocrate, un pur républicain qui de partiprisa, par le doublement du Tiers, préparé la réalisation de ses idées : « M. Necker, écrit-l, qui, au commencement de 1781, avait publié son fameux Compte rendu, fut accusé dans le Mercure d'avril de la même année, n° 14, page 8r, journal de Bruxelles, de faire lous ses efforts pour rendre le roi de France chef d'une république bien dirigée. Je ne soupçonnais point encore ses projets ; cette imputation me parut atroce et j'envoyai au Journal de Paris un mot par lequel je crus devoir prendre sa défense?. » — « Necker voulut la démocratie et toutes les productions des écrivains qu'il avait à ses gages eurent pour objet d'enflammer le petit peuple même... M. Necker ne tarda pas à annoncer ses intentions républicaines en demandant aux notables de 1788 une double représentation pour le tiers état. »

Mais Moreau a écrit ses Souvenirs sous le Directoire en 1796 et 1797. On peut objecter, bien que rien ne l'indique, qu'il a reporté dans le passé les impressions et les jugements que lui avait inspirés la grande révolution dont il avait été le témoin. Mais voici un livre publié en 1770, le Diclionnaire social el patriolique ou précis raisonné de connoissances relalives à l’économie morale, civile et politique par M. G. R. L. E. D. B. À. À. P. D. P. #, à Amsterdam, M. DCC. LXX. : C’est un de ces écrits de propagande philosophique et politique, comme en a vu tant éclore la seconde moitié du xvrrré siècle ; l'influence de l’école des économistes est visible sur celui-là. Voici ce qu'on y lit sous le mot République : « J'aime mieux, disoit un zélé républicain, être moi-même

1. Souvenirs, &. IT, p. 406: eM. Turgot avait affiché l'irréligion et la liberté indéfinie ; à cette époque avait commencé la licence de tous les écrits qui, débités sous les yeux du monarque, invitaient les peuples à se soulever contre lui: Les Parlements et la noblesse avaient été empoisonnés par l'abbé Ragual et par l'abbé Mably ; l'ambition et les richesses avaient corrompu le clergé. Mais c'était encore leur propre aristocratie que ces gens-là désiraient substituer à l'autorité de nos anciennes lois. »

2. Souvenirs, t. II, p. 322. — 3. Souvenirs, t. IL, p. 4o7et og.

h. D'après Barbier, Dictionnaire des ouvrages anonymes el pseudonymes, l'auteur sert Le Févre de Beauvray.