Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

LES IDÉES DE GOUVERNEUR MORRIS SUR LA FRANCE 69

partie du Gouvernement que de servir d'instrument à l’ambition d’un maître dont l'intérêt n'est presque jamais le mien. — Que parlez-vous d’ambition ? répondit un Français. En fut-il jamais une plus démesurée et plus destructive que celle de ces fameuses républiques, fléaux de leurs propres citoyens et du monde entier qu’elles ont toules écrasé sous le poids de leur

uissance énorme ? Oui, les fastes de la Démocratie sont nulle fois plus alroces que celles de la Roiauté. J'en appelle à l'histoire desCarthaginois, des Romains, des Anglois et à celle de loules les républiques anciennes el modernes !. »

Il ressort clairement de là que, vers la fin du règne de Louis XV, les royalistes purs (et les économistes étaient du nombre, fort attachés au pouvoir absolu) considéraient comme républicains non seulement Jean-Jacques Rousseau et ses disciples, mais aussi les Anglais et les partisans français d’une monarchie à l'anglaise. La suite de l'article n’est pas moins instructive. L'auteur y raconte comment en Angleterre un membre influent du gouvernement voulut séduire et acheter un des principaux chefs du parti populaire M. S**: « Il se transporte chez M. S** pour lui faire les propositions les plus avantageuses soit pour sa famille, soit pour ses amis, soit pour lui-même. Le député à ce moment était à table. La frugalité plébéienne présidait à ce repas. Après avoir tranquillement écouté le discours du courtisan : « Milord, lui dit le « patriote, regardez les mets dont je me nourris et jugez vous« même si l’on peut se flatter de gagner un homme tel que « moi. » Cette réponse ressemble assez à celle que fit Fabricius aux envoyés du roi d'Épire. Mais ce n'est pas la première fois que des républicains modernes se piquent d'agir et de parler en Romains. Si l’on en croit quelques écrivains anglais, 1l _ s’en faut de beaucoup que cette intégrité soit générale dans

la nation ?. » Ce n’est point évidemment contre les Anglais que l’auteur polémique, mais contre les Français qui partagent leurs idées politiques : et, qu'on le remarque, dans le dernier passage cité on trouve exactement attribués au soi-disant

«

5. P. 466. — 2. P, 4zr.