Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

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député anglais Les idées, le ton et le langage même des républicains français de 1792 et de 1793*.

Marmontel a signalé aussi ces républicains encore mal dégagés de la chrysalide. Necker en est un à ses yeux: « Le désintéressement avec lequel Necker avait voulu servir l'État contribuait encore à le faire passer pour un altier républicain, qui vouloit qu'on lui dût, sans rien devoir lui-même; et, pour dire toute ma pensée, en refusant, comme il l’avoit fait, les appointements de sa place, Necker avoit dà s'attendre qu'on expliqueroit mal cette fierté, humiliante pour tous ceux qui ne l’avoient pas, et qui ne pouvoient pas lavoir ?. »

Mais ses souvenirs à cet égard se rapportent surtout aux premiers mois de 1789. Il avait été choisi comme électeur du “econd degré par le tiers état parisien, et il espérait jouer un rôle dans l'assemblée électorale et même être élu député. Il fut complètement décu et mis de côté comme trop modéré. Cela le fit étudier de plus près les idées des plus avancés. C'est ainsi qu'il signale Duport, conseiller au Parlement, qui devait devenir un des chefs de l’Assemblée Constituante : « Soit que Duport fût de bonne foi, dans son dangereux fanatisme, soit qu'ayant mieux calculé que sa compagnie les hasards qu'elle alloit courir, il eût voulu se donner à lui-même une existence politique, on savoit que chez lui, dès l'hiver précédent, il avoit ouvert comme une école de républicisme où ses amis prenoient soin d'attirer les esprits les plus exaltés ou les plus disposés à l'être *. »

À en croire Marmontel, dès cette époque ce parti, Mirabeau en tête, visait à l'abolition non seulement de l’ancien régime. mais de la royauté, et il avait un plan arrêté pour atteindre ce but. C’est Chamfort, son confrère de l’Académie française et « l’un des plus outrés partisans de la faction républicaine ». qui lui en aurait fait la révélation à cette époque. C'est un jour qu'ils étaient restés seuls au Louvre après la séance aca-

. Qu'on remarque l'expression palriote. Elle était employée dans ce sens S 1 milieu du xwu siècle. Voyez, par exemple : Apologie de Louis XIV et de son conseil sur la révocation de l'Edit de Nantes, pour servir de réponse à la leltre d'un patriote sur la tolérance civile des protestants. Paris, 1758. 2. Mémoires, &. NX, p. 114. — 3. Mémaires, t. LL, p. 17.