La France sous le Consulat

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du clergé et par la confiscation des biens des émigrés. Les plus avisés ont acquis de belles propriétés pour presque rien, en obtenant des délais pour le paiement des domaines dont ils se sont rendus acquéreurs, en abattant les bois de haute futaie, en vendant les matériaux des bâtiments qu'ils ont démolis. D'autres, de prolétaires sont devenus propriétaires de quelques arpents de lerre par le partage des communaux.

Au commencement du Consulat, le paysan était plus à l'aise que le petit rentier auquel l'Etat ne payait plus ses rentes après luien avoir rogné une partie, et que l’ancien bourgeois dont la fortune avait été confisquée ou détruite.

Ainsi, vers 1800, la société française se réorganise, en partie avec les éléments de la société de l’ancien régime, en partie avec des éléments nouveaux ; en même temps, elle s’ordonne et se classe. Le retour aux anciens usages proscrits par la Révolution coïncide avec cette réorganisation. C’est chez le Premier Consul que les femmes cessèrent d'être des citoyennes pour s'appeler de nouveau Madame. A la première réception du corps diplomatique, qui suivit l'installation de Bonaparte aux Tuileries, un domestique, en livrée vert et or, annonça: Madame, femme du Premier Consul. Quant à l'appellation de citoyen, ce n’est qu'en mai 1804 qu’elle fut officiellement remplacée par celle de Monsieur. Mais, dans la société polie, l'usage n'avait pas attendu la loi. Il en fut de même du calendrier grégorien rétabli légalement le 1* janvier 1806 : depuis longtemps le décadi avait été remplacé par le dimanche, où les gens du peuple allaient danser et boire aux Prés Saint-Gervais.

Plus lent fut le retour aux égards qu’on se doit entre gens bien élevés, aux bonnes manières, à la politesse, bref à cetart de vivre que le xvinr* sièeleavait porté à sa perfection, qui fit le charme suprême de l'ancien régime finissant, et qui, depuis, nes’est jamais retrouvé à un pareil degré. La Révolution avait

aboli jusqu'aux derniers vestiges de ce frèle et gracieux édi-