La Révolution française (1789-1815)

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Car le Grand comité, — c'était là le principal danger de son institution, — abusa.

Il dépassa souvent le but dans l'exercice d'attributions cependant illimitées, surtout en prolongeant le terme normal de sa durée en tant que moteur effectif du système de terreur. Ce terme aurait dû arriver aussitôt que le principal danger extérieur fut conjuré, la France ayant été mise sur le pied de résister à tout.

La dictature décemvirale, sinon l'action administrative et politique du Comité, aurait donc dû prendre fin dès le commencement de 1794, après les victoires de Wattignies, du Mans, de Savenay, la reprise des lignes de Wissembourg et celle de Lyon et de Toulon (1).

Danton eut certainement conscience, à ce moment même, d'une telle nécessité, et, seul aussi, il aurait été capable d'amener le Comité à résigner la toute-puissance, comme de diriger et de modérer son action.

Malheureusement, il avait cru indispensable, pour faire accepter l'institution, d'en paraître personnellement désintéressé, et de jurer de n'en faire jamais partie.

Contrairement aux préjugés vulgaires, il faut donc reconnaitre qu'ici l'insuffisance de ce grand citoyen provint de son excessive valeur morale, de sa magnanimité, qui, à défaut d'ambition, le détournèrent de prendre lui-même en mains le gouvernement. Sa haute sociabilité le poussait invinciblement à servir et à se dévouer, elle inspirait à son génie, sous l'aiguillon des calamités publiques et des dangers de la patrie, les grandes mesures de salut, mais elle n’était pas soutenue par une personnalité assez âpre pour lutter contre la bassesse et

1. La suppression du tribunal et de l'armée révolutionnaires aurait été le signe de ce retour à l’état régulier.