Lazare Carnot d'après un témoin de sa vie et des documents nouveaux

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âmes; ils substituent la vanité à la grandeur; la patrie n'est plus rien au milieu de ces hochets ; il n’y a plus d'aliments pour l'émulation; et les siècles s’écoulent sans qu'il reste aucun souvenir de ces innombrables puérilités. »

I est impossible de mieux dire. L'homme qui a écrit de pareilles lignes est certainement le plus pur et le plus élevé des moralistes. Mais ce qui distingue Carnot sur tous ces points, où il fut supérieur avec tant de force et d'originalité, c’est l'amour de la patrie qui l'anima sans cesse. IT a laissé sur ce sentiment, immuable et profond chez tous les hommes, mais qui chez lui fut inextinguible, une Invocation qui est un chef-d'œuvre d'inspiration digne d'être appris et récité en guise d'oraison dominicale.

« Je ne cherche ni à faire parler de moi ni à me faire oublier, parce que je sais me contenter du témoignage de ma conscience et mépriser la calomnie. Je puis confirmer cette grande vérité de morale universelle qu'avec un cœur pur on n'est jamais malheureux. Celui-là seul, dit Horace, est content et maître de lui-même qui chaque soir peut se dire : J'ai vécu.

Ille potens sui Loœtusque deget, cui licet in diem Dixisse, vixi.

(One xxix, Liv. m).

» Jai passé les nuits et les jours à seconder les Opérations militaires, correspondant sans secrétaire avec quatorze armées.

» Je n'ai point usé du long exercice du pouvoir qui m'a été confié pour amasser des richesses, pour élever mes parents aux emplois lucratifs. Mes mains sont nettes et ma conscience est calme.