Le théâtre français pendant la Révolution 1789-1799 : avec plusieurs lettres inédites de Talma

LES DÉBUTS DE LA RÉVOLUTION 5

« sesses et mes hontes par le ridicule, sois invraisem« blable, sois faux, ne crains rien, mon imagination « suivra la tienne aussi loin que les enchantements de «ton art pourront la conduire. Va! devine ce que « je veux; dis ce que je sens, incarne ce que je rêve, «et si, par tes impostures charmantes, tu prolonges « l'illusion que je te dois, si tu flattes jusqu'au bout « ma chimère, je te récompenserai magnifiquement, « plus peut-être que tu ne le mérites.

« . .. Ah! c’est que si frivole et si courte que « soit la fiction, elle a touché un instant à cet idéal de « justice, d'honneur, de pureté, d'amour qui est dans « l'homme et il ne souffre pas qu’on y touche impuné« ment; c’est qu’elle a évoqué son rêve, et qu'il tient « plus à son rêve qu’à la réalité; l'ombre lui est plus « chère que la proie.

« C’est pour son rêve qu'il vit, c’est pour son rêve « qu'il meurt; c'est de son rêve que lui viennent « toute force et toute foi.

« La science fait douter l’homme, le mystère le « fait croire.

« C’est avec ce qui n'est pas qu’il se console de ce « qui est; c’est avec ce qu’il espère qu’ilse guérit de « ce qu’il souffre. »

De même, George Sand, essentiellement idéaliste

elle aussi, et doucement romanesque dans ses œuvres dramatiques, écrit ceci : « J'ai fait de patients efforts pour introduire la pensée du spectateur dans un monde plus pur et mieux inspiré que le triste et dur courant de la vie terre à terre. J'ai cru que c'était là le but du théâtre et que ce délassement, qui tient tant de place dans la « vie civilisée, devait être une aspiration aux choses « élevées, un mirage poétique dans le désert de la « réalité. »

L'auteur de Claudie, de François le Champi et du

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