Le théâtre français pendant la Révolution 1789-1799 : avec plusieurs lettres inédites de Talma

LES DÉBUTS DE LA RÉVOLUTION 15

Dès huit heures du matin, une foule compacte faisait le siège des portes du théâtre.

À leur ouverture la cohue se précipita comme un torrent, comme une avalanche, que gardes et contrôle furent impuissants à contenir, brisant portes et grilles.

Sans prendre ses billets au bureau, on jetait son argent en passant. 1

Plus de la moitié de la foule agglomérée ne put trouver de place.

Des duchesses s’estimèrent heureuses d'obtenir des tabourets aux balcons, à côté des beautés plus que suspectes qui avaient là leurs sièges accoutumés.

On cita de grandes dames de la Cour qui, pour être plus sûres de leurs places, après avoir pénétré dans le théâtre, mêlées aux femmes de chambre des actrices, avaient dîné dans des loges d'artistes.

Beaumarchais jouissait de ce triomphe dans sa loge grillée, entre deux abbés, ses convives, dont la présence, disait-il, lui avait paru indispensable pour se faire administrer, en cas de mort, des secours très spirituels.

Il faut aussi reconnaître qu’en dehors de l’attraction puissante exercée par cette pièce, étincelante d'esprit, l'enthousiasme inouï du public avait été porté à son comble par la perfection d’une interprétation hors ligne et pour laquelle rien n’avait été épargné.

Ainsi Dazincourt jouait le rôle de Figaro, Molé celui d’Almaviva, Préville, l'éminent comique, avait ac-

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du faubourg Saint-Germain, on avait joué : l’Inauguration du Théâtre-Français, pièce de circonstance, en 1 acte et en vers, par Barthélemy Imbert. Elle eut peu de succès, au dire de l'acteur Fleury. Le même auteur avait fait jouer précédemment, le 8 janvier 1751, Le Jalouxæ sans amour.

Lors de cette ouverture, les prix furent ainsi fixés : parterre (debout) 48 sous, l'orchestre, les premières loges, le balcon 6 livres, l’amphithéâtre 30 sous. L'abonnement à une place de petites loges; 500 livres par an.