Le théâtre français pendant la Révolution 1789-1799 : avec plusieurs lettres inédites de Talma

16 LE THÉATRE-FRANÇAIS PENDANT LA RÉVOLUTION

cepté le rôle secondaire de Bridoison, Larive, luimême, avait eu la fantaisie de représenter le pastoureau Grippe-Soleil.

Dans les rôles de Suzanne et de la comtesse, brillaient Mie Contat (1), l'étoile incontestée de la Comédie-Française, et M'e Sainval cadette (2); enfin un Chérubin ravissant de grâce et de jeunesse (Cherubino di amore), sous les traits de M'° Ollivier, complétait un ensemble véritablement merveilleux.

Jeanne Ollivier, dont la physionomie intéressante et poétique mérite bien de fixer un instant notre attention, était cette jeune actrice d’origine française, née à Londres, dont les débuts alors, sur le théâtre de la cour à Versailles, dans Agnès de l’École des femmes (3), avaient, dit la chronique, excité un cri d’ad-

EE ———— 2

(1) Müe Contat, de son vrai nom Louise Perrin, travaillait chez sa mère, blanchisseuse de Mm°* Préville et Molé. Cellesci, frappées de sa grâce, de sa beauté et de son esprit, la poussérent vers le théâtre et la firent débuter à la ComédieFrançaise, où elle prit avec éclat le premier rang.

(2) Son véritable nom était : Marie-Blanche Algiari de Roquefort. 3) C’est aussi dans ce rôle d'Agnès que, 85 ans plus tard, la charmante Suzanne Reichemberg, à l'âge de 16 ans, faisait ses débuts à la Comédie-Française, en décembre 1868. Sem blable en tous points à lingénue de 1784, celle de 1868 souleva alors absolument le même enthousiasme.

« Mile Reichemberg, dit l'éminent critique, historiographe de la Comédie-Française, était adorablement jeune, avec cette légère écume de cheveux blonds qui moussait autour de son visage. Je retrouve noté sur mon feuilleton du lendemain Le éri d'admiration qu'elle nous arracha le premier jour. »

Et M. Francisque Sarcey reproduit le passage suivant, dont l'expression admirative n'a rien à envier à celle inspirée à la chronique de 1784 par Jeanne Ollivier :

» Elle a réussi par de là même ce que pouvaient souhaiter ceux qui attendaient le plus de cette jeunesse et de cette

grâce. Elle a quinze ans à peine, un visage exquis, et tout un parfum d'ingénuité qui voltige autour d'elle; sa voix est nette, bien timbrée et propre à rendre les nuances les plus délicates. « Elle n’a eu qu’à ouvrir la bouche pour séduire le public

ordinairement si rétif de la Comédie-Française. C'était comme