Les hommes de la Révolution

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effet, Babeuf et ses amis, reniés par ce peuple auquel ils venaient de se dévouer et qui était prêt quelques jours avant, à les suivre, devenaient à ses yeux des malfaiteurs et des scélérats.

Des mandats d'arrêt étaient lancés de tous les côtés et la terreur se répandait dans les esprits. Le 21 floréal, an IV, Babeuf fut traduit devant

sur le champ aux citoyens qui, pendant ce court intervalle, étaient arrivés à la chambre, de veiller aux fenêtres et aux moindres mouvements que ces messieurs tenteraient de faire.

«Ce fut donc à ce moment que la consternation la plus morne se peignit sur ces trois physionomies; ils eurent, comme l'on dit, tous les bras.cassés et quoique entourés d'armes à feu chargées jusqu'au bout du canon et de sabres, que je leur eusse dans le premier moment apparu seul, ils n’ont pas fait le moindre geste pour se mettre en défense.

« Babeuf s’est levé debout devant sa table, Buonarroti s’est occupé à cacher sous lui un papier qu'il a remis un instant après, et Pellé m'a observé qu'il n’était pas compris dans l'ordre. Je lui ai répondu qu'il s’en expliquerait avec le ministre de la police générale.

«Babeuf en se levant de dessus sa chaise s'est écrié: « C'en est fait, la tyrannie l'emporte». Et un moment après il m'a demandé pourquoi « j'obéissais ainsi à des maîtres». Je lui ai répondu que j'obéissais au gouvernement pour lequel le peuple s'était franchement prononcé et sans perdre plus de temps en discours inutiles j'ai continué mon opération. Û

«J'ai rassemblé les papiers qui m'ont semblés les plus propres à confirmer la vérité de cette vaste et abominable conspiration.

« Ces opérations terminées, les prévenus ont été placés chacun dans une voiture de place, et transféré sous bonne et sûre escorte de cavalerie au ministère de la police générale. Le citoyen Jolly, dont j'ai parlé plus haut, avait parfaitement rempli la mission dont il s’était chargé pour les dispositions de la force militaire; le