Les serviteurs de la démocratie

BAUDIN

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Il arriva, hélas! ce jour terrible de décembre où la constitution républicaine fut violée. Des affiches apposées nuitamment apprirent aux dépulés qui se rendaient à l’Assemblée le parjure du président de la République et la violation des lois. Que ferait-on? Dupin le cynique dit à ses collègues: « Messieurs, nous avons le droit pour nous; mais nous sommes les plus faibles; — j'ai bien l'honneur de vous saluer. » C’est de cette façon que cet orléaniste, mort sénateur de l'empire, continuait la tradition de Boissy d’Anglas.

Pendant que le président Dupin saluait ainsi ses collègues, Victor Hugo, Schœlcher, Madier de Montjau, Baudin, essayaicnt d'organiser la résistance au coup d'État. Ils parcouraient le faubourg Saint-Antoine, mais malheureusement ne rencontraient pas beaucoup d’enthousiasme en faveur de l’Assemblée dissoute. Son impopularité nuisait à la cause de la République. Dès la première heure, Baudin comprit le danger que présentait cette demi-indifférence des masses populaires. Il alla trouver son frère, jeune étudiant en droit, qui habitait le quartier latin et lui demanda d'aller vers ses amis de l’École et d'élever avec eux des barricades. Il savait que c'était envoyer son frère à la mort; mais le sentiment de la patrie et amour de la République parlaient plus haut dans le cœur de Baudin que toutes les affections de la famille. Les vertus romaines, celles qui animaient les Horace, celles que notre grand Gorneille a si magnifiquement célébrées, ont disparu, dit-

on. Elles se retrouvèrent dans toute leur sublimité le 2 et le 8 décembre 1851 en la personne de Baudin.