Louis XVI et la Révolution

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MARIE-ANTOINETTE. 35

de prudence elle parviendra à le subjuguer entièrement ». Mêmes théories, dans sa lettre du 16 septembre 1772 : « Vu le caractère et la façon d’être de M. le Dauphin, il est presque infaillible que M°* la Dauphine soit réservée un jour à gouverner la France. Il serait prématuré, peut-être même dangereux, de trop avancer ces réflexions vis-à-vis de M l’Archiduchesse, mais je m’attache à l'y préparer de longue main. » Cette idée domine toute la correspondance de Mercy, elle en fait comme le refrain : « M. le Dauphin, écerit-il encore le 14 août 1773, n'aura probablement jamais ni la force ni la volonté de règner par lui-même. Si M" l’Archiduchesse ne le gouverne pas, il sera gouverné par d’autres; de si fâcheuses conséquences ne sauraient être prévenues de trop loin. Toutes mes remarques, mes représentations, enfin tous mes discours à M°* la Dauphine portent sur ce grand objet. » Mercy trace à Marie-Antoinette un plan de domination; il s’y prend si habilement que celle-ci s’imagine à la fin l’avoir trouvé elle-même, et l'expose à Mercy avec satisfaction. Elle se flatte de diriger sou mari à son gré, et dans les moindres occasions. Tout le monde du reste s'aperçoit vite à la cour de cette influence marquée sur le dauphin. « Le peuple d’intrigants dont cette cour-ci est infectée, écrit sévèrement Mercy, le 19 janvier 1774, n'a déjà pris que trop d’ombrage du grand ascendant de M la Dauphine sur le prince son époux, et en différents temps, j'ai eu des indices certains du désir que l’on aurait de diminuer cet ascendant. Je n’ai jamais été alarmé de ce détestable projet, parce que, comme j'en connais les ressorts, il m'est facile de les dévoiler à M" l’Archiduchesse, laquelle est parfaitement attentive et sur ses gardes dans ce point délicat. » Le moindre bourgeois de Paris est du reste aussi bien informé là-dessus que le courtisan de l'OEil-de-Bœuf. A l'entrée solennelle des deux époux, « M. le Dauphin, qui cependant de son côté s’est parfaitement bien comporté, n’a été regardé que comme un accessoire à cette cérémonie »,