Louis XVI et la Révolution

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à prononcer, en réponse à une harangue du président de la Constituante. Celui-ci modifia le texte qu’il avait montré au garde des sceaux : la reine improvisa sa réponse.

Marie-Antoinette a surtout un respect d’elle-même qui dénote un vrai fonds de vertu. Et c’est un de ses meilleurs côtés que sa persévérance à repousser tous les conseils de prudence démoralisante que lui prodiguent Marie-Thérèse et Mercy. Il y a une réelle dignité dans son refus de faire sa cour à celle qu’elle nomme « la Barry ». Elle réplique à sa mère, et d’une façon très ferme, « qu’elle n’a besoin d’être conduite par personne pour tout ce qui est de l'honnêteté. » Sa correspondance avec l’impératrice se ressent même quelque temps de ce. froissement intime. Elle est gènée, comme adressée à un mentor qu’on ne veut plus guère instruire de tout ce qui se passe. Ces lettres sont tellement creuses que Marie-Thérèse ne sait plus que répondre. Elles sont sèches, comme d’une fille qui ne veut plus être morigénée. Une fois même, au grand scandale de la mère, une lettre est envoyée inachevée. Marie-Antoinette se défie un peu des conseils qu’on lui expédie de Vienne, parce qu’elle y devine un but politique. Au contraire, au témoignage du baron de Staël, « elle aime la vérité, et on peut la lui dire si elle est persuadée de la probité et du désintéressement de celui qui lui parle. En traitant avec noblesse et franchise, on est sûr de lui plaire, serait-on même d’une opinion contraire à la sienne. » Cela n’est pas d’un petit esprit. Fière, indomptable à la violence, la reine devait trouver surtout plus tard l'emploi de son énergie latente. Le 9 mai 1790 elle écrira : « Ces deux journées ont été horribles; mais au lieu de m'abattre, je sens qu’elles me redonnent de la force. » À coup sùr cette vigueur morale ne pouvait, surtout aux débuts, que lui attirer de la considération : elle est quelqu'un; suivant la formule un peu bizarre de Mirabeau, dans une de ses Notes pour la cour, le Roi n’a qu’un homme, c’est sa femme.

Cette virilité de l'esprit est compatible avec une bonté