Napoléon Ier et le Roi Louis : d'après les documents conservés aux archives nationales

LXII NAPOLÉON I ET LE ROI LOUIS.

pas fermer les ports, c’est-à-dire réduire les revenus et les fortunes particulières, et en même temps payer l’armée, payer d’autres troupes, une flottille. Quand il ne peut venir par. mer ni blé, ni sel, dont on ne peut se passer, ne faudrait-il pas qu'il en vint de terre? Enfin, Sire, demandez-moi ce que je puis, et surtout ne me montrez ni mépris, ni trop de politique. V. M. doit sans doute en avoir, mais pas avec moi. Je dis franchement mon but. Je suis venu ici malgré moi. Ce que j'aime le mieux au monde, ce que j'ai toujours aimé, c'est d’être simple particulier. Si ce pays était heureux, je le quitterais sans peine; malheureux, je dois périr avec lui. Tout faible que je suis, je ne le suis pas assez pour ne pas sentir cela. Dans le premier cas, j’en sortirais sans déshonneur ; dans le second, mon nom serait Justement en exécration (1). »

Napoléon se tut sur cette seconde lettre, comme il avait fait sur la première. Quant à Louis, on peut se demander comment, avec les sentiments qu’il manifestait, il ne renonçait pas dès lors à une royauté si pénible. Faut-il voir dans cette conduite l'effet d’une irrésolution particulière aux âmes faibles? Était-ce que, malgré tout, il espérât encore pour la Hollande et pour lui-même un avenir moins difficile? Était-ce plutôt que, subissant l’ascendant de son frère et redoutant sa sévérité, il n’osât, sans son assentiment ; se démettre de la couronne? Était-ce enfin qu'il crûtimpossible, ainsi qu’il le disait, d'abandonner sans lâcheté son pays d'adoption dans le moment où il le voyait malheureux? Peut-être toutes ces pensées l’agitaient-elles à la fois? Un fait qui se passa au mois de janvier 1808 ajouta encore à ses perplexités.

(1) Louis à Napoléon, 31 octobre 1807, p. 139 à 141.