Oeuvres diverses, page 226
que la démoralisation et le désespoir. On sema sur tous les tons que la résistance était impossible, — que nos jeunes recrues ne pouvaient pas tenir devant les vieilles bandes prussiennes, On exalta systématiquement l’ennemi au détriment des forces nationales. Bref, le gouvernement mit à désorganiser la résistance toute l’énergie qu'il eût dû employer à la soutenir, et il vint devant la Chambre se faire une arme de cette désorganisation, son chef-d'œuvre de trahison !.…
Or, ce découragement, fruit factice chez nous du machiavélisme bourgeois, était réel chez les Allemands. Le citoyen Dubois, maire de Dijon, mon collégue et votre élu, que ses fonctions mirent en rapports constants avec l'état-major ennemi, m'a bien des fois raconté l'abattement de nos prétendus vainqueurs, leurs jérémiades sur l’obstination de la France à leur tenir tête, et leur projet bien arrêté, en cas d’une prolongation de lutte, de se rabattre sur l’Alsace et la Lorraine et de s’y cantonner. Et voilà l'instant choisi par nos illustres diplomates pour donner la France aux Prussiens et leur livrer en gage des provinces qu'ils allaient abandonner.
Monstruosité que vous aurez peine à croire, sur les décombres de vos demeures et les débris de vos récoltes, cette paix, question si grave, ourdie comme un complot, a été votée sans discussion, sans contrôle, dans les ténèbres. Logiquement elle devait être précédée d’un examen sérieux de nos ressources et de nos forces militaires. On a enfoui avec soin tout renseignement et tout rapport. Thiers vint mentir à la tribune que la guerre était impossible et qu'aucun homme du métier ne pourrait le contredire. Ce qui n’empécha point que sept généraux commandant nos armées, par leur vote et leur abstention, non moins significative, ont appliqué le soufflet le plus virulent sur cette face de traître. Chanzy, Mazure, Billot, Loysel, Deligny,