Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3, page 231
192 . ASSEMBLEE
Ce vaste débordement d’émigrés n’empêchait pas qu'il ne restât en France un parti contre-révolutionnaire beaucoup plus considérable qu’il ne l'était aux premiers jours de la révolution. Comme il n’avait ni direction , ni chef connu, il se mêla peu aux événemens mémorables de cette année. Mais il aigrissait contre lui le peuple par des sarcasmes répandus sur tout ce que le peuple aimait encore. Quelques royalisies, moins exaltés, demeurèrent, convaincus que leur poste ne pouvait être ailleurs qu’auprès du roi. Parmi eux étaient plusieurs hommes recommandables par d’antiques services, et des vertus qui avaient fait l’ornement d’un temps plus heureux. Ils reparaissaient quelquefois dans une cour morne et attristée. On les vit dans des occasions périlleuses. La destinée de plusieurs fut de suivre on de précéder Louis à l’échafaud.
Outre ce parti, désigné sous le nom d’aristocrates, trois autres partis s’agitaient, se combattaient, et chacun d’eux avait encore dans son sein d’autres subdivisions. L'assemblée législative était formée de ces divers élémens que nous allons parcourir. L'époque où elle avait été élue, contribua beaucoup à donner à l’assemblée constituante des successeurs dangereux. En effet, les assemblées primaires avaient été convoquées à l’époque même de la fuite du roi,: quand les esprits fermentaient de soupçons et de ressentimens. Les vœux publics allèrent chercher les hommes passionnés; les corps électoraux ne se réunirent, il est vrai, qu'après que l’assemblée constituante crut avoir dissipé, par la force et la sagesse, le nouvel orage qui s'était élevé. Mais l'esprit qui l’animait, n’était pas celui de plusieurs des corps électoraux. Les uns nommèrent pour détruire, les autres pour conserver. La majorité se trouva com posée d'hommes de bien, qui voulaient faire, avec franchise; l'essai de la constitution nouvelle. ‘ Fa
Voici qu’elle était la position des hommes du parti constitutionnel. Ils défendaient les ministres, et souvent ils n’avaient pour plusieurs d’entr'eux ni affection, ni confiance; ils défendaient le roi et la cour, et ils trouvaient le:roi trop inactif. La cour leur était beaucoup plus suspecte, ils n’en recherchaient point la faveur, ils en recevaient quelquefois des mépris. Ils défendaient la constitution, et l'expérience de haque jour leur en faisait sentir les défauts; ils défendaient enfin ce qu'il y avait de plus raisonnable dans la déclaration des droits de l’homme, contre ceux qui l’invoquaient avég, fanatisme , et lui donnaient un sens vague et délirant. Mais ce qui rompit le plus souvent leur ligue , ce fut la peur. Ils avaient une foule de partisans sécrets, qui craignaient de se montrer dans leurs rangs, que le tumulte déconcertait, qui avaient sans cesse la crainte