Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3, page 252

LEGISLATIVE. 213

breuses victimes de lui échapper, il éclata, le dimanche 30 octobre 1701. Les commissaires pacificateurs étaient éloignés.

La ville est investie, les portes sont fermées; une troupe, commandée par le barbare Jourdan, va chercher, dans leurs maisons , les malheureux voués à la mort. On les entasse, au nombre de plus de soixante, dans le palais ; les monstres , que rien n'empêche de commettre lenr crime. attendenteependant les ténèbres, comme plus favorables àleurférocité. Ils viennent enfoncer les portes de la prison, chacun d'eux est maître d’assouvir sa rage par un supplice deson choix. Gn rapporte qu'un jeune homme, de dix-huit ans, immola quatorze personnes de sa main, et qu'il se plaignait encore de sa lassitude. Le père est rapproché de ses enfans , la mère de sa fille, comme pour les faire expirer à chaque coup qui tombe sur des êtres si chers. Douze femmes sont immolées : ma plume ne peut exprimer qu’elies tortures on leur fit subir. Le jour paraît, deux victimes ont échappé à la faveur de la nuit, on les retrouve, on les rejoint à leurs malheureux compagnons. Parmi eux était un prêlre âgé de soixante-dix-buit ans, bienfaiteur des pauvres; ni la pitié, ni même la reconnaissance, ne peuvent le protéger. Enfin, quaud il ne reste plus, devant ces bourreaux, que des restes inanimés, ils les déchirent, ils les mutilent , et les cadavres, tronqués , sont entassés dans une glacière qu’on mure; d’autres sont jetés dans le Rhône. Telle fut cette nuit désastreuse, modèle des horreurs qui bientôt devaient se commettre parmi nous. Les commissaires envoyés dans cette ville arrivèrent trop tard pour arrêter tant de crimes, mais par= Jèrent au moins de les punir. Lâches à l’aspect de la force, ces bourreaux, couverts de sang , se laissent enchaîner. L’assemblée législative ne put entendre cet éponvantable récit , sans pousser des cris d’indignation : le président s’évanouit en lisant la lettre qui révélait à l'univers ce comble de férocité. Malheureusement , ce premier mouvement d'horreur se calma dans desames entraînées par l'esprit de parti; au bout de quelque temps, on parla d’aministie, on l’obtint, et on eut le 2 septembre. «

On n’apprendra pas sans étonnement, que, parmi les hommes qui furent accusés d’avoir dirigé les assassinats d'Avignon, ils’en trouva qui furent capables de remords, et qui voulurent quitter la carrière du crime. Il y en eut deux qui moururent victimes du 3r mai.

Le désastre de Saint-Domingue embrassait encore un plus grand nombre de victimes et portait un coup plus cruél à la France. Les malheureux colons étaient, depuis long-temps, divisés entre eux. Frappés de crainte sur les effets que le dogme politique de l'égalité des hommes devait produire parmi les