Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3, page 266

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affecta de répandre que l’un et l’autre avaient à craindre les pensées ambitieuses des princes français ; Que ceux-ei songeaient à se prévaloir de l’état d’abjection où vivait l’infortuné monarque; que, parmi les émigrés , Ja reine avait plusieurs ennemisdangereux étvindicatifs. On citait le cardinal de Rohan qui avait rassemblé une légion à ses frais. Les jacobins se gardaient bien d'adopter ces suppositions: ils afirmaient, au contraire, que la cour entretenait des intelligences avec le cabinet autrichien. Malgré tous les soins qu’on a pris; depuis huit années, pour éclaircir ce fait, on n’a encore obtenu aucune révélation qui prouvât le‘concert de Louis avec ceux qui parlaient de le venger. On sait seulement, par les mémoires de Bertrand de Molleville, que Louis, lorsqu'il vit la guerre engagée, s'effraya des dangers que devaient lui faire courir les triomphes des armées étrangères | d). Il espéra pouvoir obtenir de l’empereur et du roi de Prusse, qu’ils ne fissent contre la France qu’une guerre défensive, et qu’ils attendissent, pour agir offensivement , qu’ils y fussent absolument forcés. Il désirait, par dessus tout, que les deux puissances fissent, avant d'entrer sur Le territoire français, une déclaration qui rentre‘raitabsolument dans les intentions exprimées par le prince de Kaunitz, au nom de l’empereur Léopold. Ils’agissait de trouver un négociateur habile, qui parvint à faire entendre ce vœu de Louis, aux deux rois qui se promettaient de prendre sa défense. On fit choix de Mallet- Dupan qui, dans ses écrits, s'était montré un détracteur véhément de la révolution française, et qui cependant était sans faveur dans le parti opposé, parce qu’il en condamnait toutes les fautes, et parce qu’il était d'ailleurs partisan des principes de la liberté anglaise. On eut recours à de petits expédiens bien timides, pour accréditer ce négociateur. On lui avait donné, pour instruction, de recommander fortement aux puissances de ne point mettre à la tête de leurs armées les émigrés francais. La mission de Mailet- Dupan n’obtint aucun succès. Les émigrés parvinrent aisément, par leurs intrigues, à lui ôter toute espèce de crédit et de confiance. On peut conclure de ce fait, que Louis n’avait aucune correspondance établie avec les cabinets étrangers, puisqu'il était obligé de se servir d’un moyen si faible et si incertain, pour faire connaître ses intentions. On en peut conclure encore qu'il . n'était pas sans ombrage sur les desseins de quelques émigrés, ou du moins sur les dangers que leur imprudence pouvait lui faire courir. Enfin, cette révélation fait présumer que la note confidentielle du prince de Kaunitz, contenait tous les secrets de la politique de Louis. On ne peut parcourir toutes les factions qui existaient alors en France, sans y trouver des partisans de la guerre. Les con-