Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

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l'objet de l’aversion populaire. C’étaient les ex- ministres Montmorin et Bertrand, et Malouet qui , dans l'assemblée constituante, combattant deux partis extrêmes, recut la haîne de chacun, mais plus particulièrement celle du parti patriote. Bertrand assure avoir proposé, dans ce comité, plusieurs expédiens hardis. Mais Louis rejetait, quelquefois par scrupule, et le plus souvent par faiblesse , toutes les résolutions qui demandaient de l'adresse et de la vigueur. En dernier résultat, il ne lui restait de moyen actif de défense, que sa liste civile. Dès qu’elle parut être ouverte aux intrigans , ils accoururent en . foule pour se partager cette dépouille. On paya quelques me neurs de groupes, qui ne réussirent jamais qu’à se faire chas= ser honteusement ; on paya des affiches qui étaient bientôt arrachées ; on paya quelques chefs de jacobins, et ceux-là mettaient leurs services à un prix très-élevé. On ne peut même concevoir de quelle nature étaient ces services, car ils ne frent jamais que des motions atroces, et dirigées contre la cour. La liste civile s’épuisa bientôt, dans ces profusions inutiles et dangereuses. Danton et Fabre d’Eglantine furent ceux des jacobins qui recurent le plus de la cour. { Si l’on en croit Bertrand de Molleville, Danton reçut jusqu’à cent mille écus. } Nous verrons, au ro août, quel usage ils firent de cet or. Cependant l’indigaation commençait à rendre un peu de forces au parti constitutionnel; les jacobins ne négligeaient rien pour épouvanter leurs adversaires.

On allait instruirele procès des assassins d'Avignon. Les jacobins du midi prirent an vif intérêt à leur cause; ceux de Paris s’annoncèrent bientôt comme leurs défenseurs. L'assemblée frémit, en écoutant les premières pétitions qui lui parlaient d’amnistie pour un tel crime. Elles redoublèrent, Bles Hovintent plus pressantes. et l’assemblée se familiarisa avec cette idée. Le parti de la Gironde se trouva dans un grand embarras : il sentait que toutes ces fureurs révolutionnaires allaient le su bordonner, lui et la révolntion , à l'empire des assassins. Sa politique et sa morale plaidaient contre Vamnistie ; mais en parlant contre elle, il perdait tout espoir de crédit auprès des jacobins. Toujours plus envenimé contre la cour, il craignait de se détacher de ces auxiliaires , dont il aurait bientôt à implorer le secours : pour ne pas perdre sa popularité, il se résolut à défendre des assassins, Lasource et Vergniaux furent les orateurs de l’amnistie : Dumas ,; Vaublanc et Girardin s’élevèrent avec force contre cette scandaléuse et criminelle indulgence. Ils eurent , Contre leurs adversaires, le terrible avantage de prophétiser le grand crime qui fut sans doute inspiré par l'impunité des crimes d'Avignon. Ils cherchèrent à reproduire, par des tableaux terribles, le sentiment d’hor-