Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

LEGISLATIVE. 263

avaient voté pour Lafayette, furent insultés et frappés: quelques gardes nationales accoururent, et parvinrent à les sauver des fureurs et des outrages de la multitude, Les jacobins et les cordeliers passèrent la nuit entière à préparer l'attaque contre le château des Tuileries.

Le lendemain 9, un calme sombre règne dans Paris, Les députés outragés la veille, viennent en vain demander.yengeance à l’assemblée; leurs adversaires se complaisent à entendre le récit des dangers qu’ils ont courus. Ils se demandent ce qu'est devenue cette majorité qui venait de leur donner un triomphe d’un moment. Elle partage leurs périls; car déjà les jacobins ont fait afficher l'appel nominal ; néanmoins elle se tait, et ne s'occupe ni de vengeance, ni même de précautions. Gependant Rœderer, procureur-syndic du département, ar-

rive à l'assemblée ; il dévoile la conspiration qui se prépare :

» C’est pour demain, dit-il, Dès ce soir , les sections doivent » se déclarer en insurrection, jusqu’à ce que l’assemblée ait » prononcé la déchéance du roi: Les fédérés et les marseillais

doivent marcher à la tête des insurgés: le faubourg Saint Antoine est dans la plus affreuse agitation. Cependant le » maire de Paris ne donne pas au département les avis néces-

» saires, ne répond pas aux lettres les plus pressantes: il n’y

» a plus un moment à perdre; à minuit vous entendrez sonner » le tocsin et battre la générale ; c’est à assemblée à prendre » les précautions nécessaires pour assurer son indépendance,

» pour mettre le roi à l'abri des périls qui le menacent. Le » département de Paris remplira fidèlement et courageuse-

» ment ses devoirs: sa marche lui est tracée par la loi; mais

» ses forces, il ne peut les tenir que de vous: »

Cette déclaration augmente le trouble qui règne dans l’assemblée. Vaublanc demande qu'on éloigne à l'instant, de Paris, les fédérés et les marseillais. A cette proposition Guadet éclate, et rejette loin tout voile-de modération. À queis hommes pusillanimes, s’écrie-t-il, a-t-on pu persuader qu’ils avaient à craindreles coups des défenseurs de la patrie ? Toute profonde qu'est leur indignation, elle ne se livrera point à des excès condamnables. Veut-on payer de cet opprobre le dévouement dont ils nous entourent? Non, ce n'est point de ce côté que nous avons à craindre les poignards; il est une faction qui les dirige. Nommer-la {s’écrie-t-on). C'est ceile qui a voulu élever au-dessus de la représentation nationale un généralrebelle, qui a dicté ses insolentes pétitions , qui a conduitses audacieuses démarches, qui n’a cessé d'appuyer tousles complots d’une cour perfide, qui peut-être, dans ce moment, conspire avec elle la perte des amis de la liberté, qui lui a vendu le sang du peuple, À cette violente apostrophe les députés accusés se

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