Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3
LEGISLATIVE. 275
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vention nationale, et la suspension provisoire du roi, jusqu’à ce que la convention ait prononcé sur les mesures nécessaires pour maintenir la souveraineté du peuple. On nomme un député pour porter ce décret aux insurgés; ils paraissent se calmer, ils permettent qu’on éteigne l'incendie du château. Un d’entre eux arrive à la barre, il tient sous son bras un suisse qu’il a fait son prisonnier. « Epargnons, dit-il, ces instrumens d'un roi perfide ; » il l’'embrasse : l’excès de son émotion l'afffiblit, il tombe évanoui. L'assemblée cherche à profiter de cette scène pour engager les vainqueurs à la clémence.Cependant la fureur n’était point encore assouvie; on conduisait à l'Hôtel-de-ville quatre-vingts suisses, et la garde nationale s'efforcait de les protéger. Une foule immense se précipite sur eux, disperse leurs gardes; on n'entend que ces terribles cris : Point de quartier ! Vengeance ! Vengeance ! Ils ont égorgé nos frères. On les massacre ; épuisés, éperdus , ils ne défendent plus la vie, et n’implorent qu’une mort prompte. La rage fut ortée à un tel excès de démence, qu’on entra dans un grand nombre d'hôtels, pour y massacrer les portiers suisses. Quiconque avait donné asile à ceux du château, expiait, par une mort cruelle sa pitié généreuse. Cependant il y eut des hommes, et sur-tout des femmes, qui se dévouèrent à les cacher. On frémit quand on entend rapporter l’anecdote suivante , qu’onassure êtreauthentique. Une femmeavaiteu lecourage de donner asile à trois de ces malheureux. Elle entend frapper à la porte. Des cris menaçans la font frémir; elle essaye encore de cacher, sous des matelats, les trois proscrits. On entre. On la presse de les découvrir, de les livrer. IL y va de sa vie, si elle refuse; elle résiste. Cependant les suisses sont aperçus. « C’est maintenant que tu vas expier ton crime, dit un barbare à cette femme, prends ce sabre et frappe deta propre main ceux que tu assoustraits à la colère du peuple.» Ellechancelle; on lui prend la main, on dirige ses coups. L’horreur de cette scène trouble sa raison; elle w’a pu la recouvrer depuis. Le peuple demandait qu’on lui livrât les suisses qui avaient accompagné le roi à l'assemblée, et qui par conséquent n’avaient eu aucune part à l’action. L'assemblée donna ordre de les recevoir dans son enceinte; tout faisait craindre qu’on ne vint les y chercher , et qu'à côté d’eux on ne frappâi d’autres victimes; cependant l'assemblée ne retira point sa protection à ceux qui pouvaient lui faire partager ses périls. Elle profita du moment où la lassitude avait dompté les hommes les plus furieux, pour faire conduire ces suisses au palais Bourbon. Plusieurs de leurs chefs furent transférés à l'Abbaye, un sort funeste les y attendait. Cette journée coûta encore la vie à l'un des hommes les plus