Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3
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échappé aux massacres. Mais les dominateurs du moment ne. pouvaient subordonner leurs vengeances à aucun calcul de politique extérieure. Plusieurs des officiers suisses mis en jugement furent cependant acquittés : un seub, le major-généra} Bachmann fut condamné, Le peuple vit, avec plus d’étonnement que de sensibilité, la fermeté imposante d’un militaire qui s’avancçait avec fierté vers une mort glorieuse encore à ses yeux, quoiqu’elle fût hors des combats. Le colonel d'Affry, deux fois mis en jugement, fut deux fois acquitté. Il prouvait, par an alibi, qu’il m'avait pu, ni donner, ni connaître l’ordre fatal. Montmorin, gouverneur de Fontainebleau , fut aussi scquitté par le même tribunal : la commune en poussa des cris de fureur ; elle demanda la cassation de ce jugement à l'assemblée nationale, qui ne rougit point d’sttenter à la liberté. des juges qu’elle avait créés. : ‘ L’irritation des esprits était tous les jours accrue par linvasion étrangère qui s’effectuait. À la nouvelle du 10 août, le roi de Prusseavaitredoublé d'activité et d’audace :il commandait une armée de soixante-dix mille hommes, forte sur-tout en. cavalerie. Le grand nom de Fréderic, le souvenir de sés victoires, avaient profondément gravé la terreur des armées prussiennes. Le duc de Brunswick, nommé généralissime de cette expédition, avait été désigné par Fréderic fui-même, et par. l'opinion de l'Europe, comme le plus grand: capitaine de ce temps. Sous lui, commandaient encore plusieurs généraux qui. s'étaient souvent combattus pendant la guerre.de sept ans. Le roi enflammait tous les esprits par la démonstration des sentimens chevaleresques qui convenaient à la cause qu’il venait défendre : et lui et son fils étaient avides de gloire-et de dangers. L'infanterie ne faisait pas la force principale de cette armée; mais elle était exercée aux plus savantes manœuvres. Le roi avait avec lui beaucoup d’artillerie de campagne, peu de pièces de siége ; il comptait sur des intelligences pour s’emparer de plusieurs places importantes. Vingt mille émigrés, conduits par les frères du roi, se présentaient comme une avant-garde redoutable, jalouse sur-tout de prendre pour elle tous les périls de cette expédition. On y voyait des généraux qui avaient acquis de la gloire dans notre dernière guerre continentale, tels que le maréchal de Broglie et le maréchal de Castries. Gette troupe, où chaque soldat avait été auparavant officier, et n’en avait pas perdu le souvenir, offrait par son luxe, par l’ardeur de ses passions, par la présomption de ses discours, un singulier constraste avec Ja discipline et le flegme des Allemands. Enfin, quinze mille Autrichiens , sous les ordrés du général Clairfait , étaient destinés à seconder les mouvemensde la grande armée. Les succès semblèrent d’abord :