Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

LEGISLATIVE. 291

mettre à l'épreuve ces malheureux prêtres; ils leur offrent la vie, sous la condition de prêter le serment ; tous s’y refusent. Les octogénaires ne sont point respectés, et n’obtiennent pas même la faveur de mourir les premiers. Plusieurs curés de Paris, qui, dans le cruel hiver de 1789, avaient su, par les heureuses inventions de la charité, nourrir un peuple innombrable, furent égorgés par quelques-uns de ceux à quiilsavaient distribué des secours. ....! je ne décrirai point les horribles détails de leurs tortures ; deux ou trois seulement échappèrent. Les prisons de là Forceet de l’Abbayesontinvestiesà-la-fois. Ilse forme dans les cours un horrible tribunal; quelques-uns des assassins se transforment en juges. Les prisonniers étaient amenés devant eux; ils consultaient les registres des écrous ; rarement ils écoutaient quelques motsde justification, ils cherchaient encore à aggraver le supplice de ces malheureux par la plus féroce ironie; quand ils les envoyaient à la mort, ils prononcaient ces mots : Elargissez, monsieur. Le signal d’absolution était le cri de Vive la Nation ! Tous les officiers suisses qui se trouvaient à l'Abbaye furentmassacrés. Un d’entre eux, nommé Reding, qui était malade des blessures qu’il avait reçues à la journée du 10 août, ne put obtenir de recevoir la mort dans son lit, et fut traîné dans la rue. Un jeune homme, nommé Maussabré, s’était caché dans une cheminée. Le barbare geolier l'appelle, le découvre, tire sur lui un coup de pistolet, et l’étoufle avec un feu de paille. Ilfut donné à un petit nombre de prisonniers de conserver quelque sang-froid dans ces affreux momens, Des hommes très-signalés trompèrent les bourreaux, en affectant leurs formes et leur ton. Un zèle héroïque, et qu’à peine on comprendra, poussa des amis, des parens, des domestiques à se mêler au milieu des assassins, à fraterniser , à boire avec eux ; etquand le prisonnier, objet de leurs sollicitudes, paraissait devant le tribunal de mort, des cris de grace s’élevaient tout-à-coup en leur faveur, et les juges entraînés, répétaient : Grace. Des commissaires de sections parurent, traversèrent une voûte de piques, de sabres, de massues, pour venir réclamer des citoyens, qui presque tous leur furent rendus. Grand Dieu ! les sections sont assemblées, elles délibèrent , elles se bornent à présenter quelques pétitions aux assassins. Cependant, qui n’admirera pas le dévouement des hommes intrépides qui acceptèrent de telles missions! L’ami malheureux, du plus malheureux des rois , Vex-ministre Montmorin, fut une des premièresvictimes; son frère, vainement absous par le tribunal, périt avec lui. Le ministre d'Abancourt, le commandant de la gendarmerie , Rulhières, le jeune Rohan-Chabot, neveu du ci-devant due