Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

26 INTRODUCTION.

monarque aîtaque tous les jours chacun des postes des assiégés, les occupe et les reperd plusieurs fois. Il tente enfin une attaque générale , il y combat avec son fils, le prince royal. La crainte d’être obligé de fuir encore une fois devant des républicains donne à sa bravoure naturelle toutes les forces du désespoir , et cependant il ne peut surprendre ni enfoncer en aucun point l’armée de Kosciusko. Il est obligé de se retirer ; il abandonne le siége; il hâte sa retraite, parce qu'il apprend qu’une insurrection s’est élévée dans ses propres états.

Mais les Polonais n'avaient jamais long-temps à se réjouir d'une victoire. L'impératrice de Russie avait fait marcher en Pologne deux nouvelles armées , l’une de quarante mille hommes, sous le commandement de Souwarow, l’autre de quinze mille, sous le commandement de Fersen. En outre, dix mille Autrichiens s’avancaient vers la Gallicie, car l’Autriche accourait au partage. Le roi de Prusse, quoique fugitif, était encore à surveiller. De si puissans secours devaient relever son courage. Les Polonais ne pouvaient porter sur tous les points menacés que des forces insuffisantes ; encore avaient-ils armés les serfs, auxquels la révolution nouvelle et quelques actes de Kosciusko promettaient la liberté. Û

Il était du caractère de ce général de ne pouvoir attendre l'ennemi. Il se précipita encore une fois au-devant des armées formidables qui entraient dans la Pologne. 11 voulait empêcher Fersen de faire sa jonction avec Souwarof. Il fut trahi par un de ses lieutenans , le général Poniuski, qui le priva d’un secours sur lequel il comptait. Attaqué par le général Fersen, il lui disputa long-temps la victoire. Enfin, percé de coups, il tomba sur le champ de bataille, et fut livré à la vengeance des Russes. Sa patrie ne put lui survivre.

Souwarow, de son côté, eut peu de peine à vaincre les divisions polonaises qui lui étaient opposées. Il s’avanca sur Varsovie. Tous les débris de l’armée s’étaient réfugiés dans les fortifications de Prag, faubourg de la capitale. lis y furent attaqués, vaincus, après un combat ou neuf mille hommes d’entre eux périrent. Soit que les soldats russes eussent juré la vengeance de leurs compatriotes tués à Varsovie, soit instinct de férocité dans eux et dans leur général, l'instant qui suivit cette victoire fut mille fois fie horrible que la victoire même. L’un des massacres es plus odieux dont parle l’histoire eut lieu dans le faubourg de Prag. Trente mille victimes y furent égorgées quand il n’y avait plus de combat, égorgées sans distinction d'âge ni de sexe.