Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

EXECUTIF. 17

exprès l'abandon de toute la rive gauche du Rhin aux Français. Les plénipotentiaires de l'Empire se virent forcés d’adhérer à l’uffimatum qui exigeait cette condition. L’Autriche n'a vait osé s'y refuser ouvertement ; elle apercevait à regret un grand empressement , de la part des principaux états de l’AIlemagne , à entrer dans le système politique de la Prusse, et cette puissance combinait fortement tout le parti qu’elle pourrait tirer de sa neutralité.

La cour de Vienne, désespérant d'entraîner le corps germanique dans sa cause , eût encore pris le parti de dissimuler long-temps ses ressentimens contre les Français, si elle n’eût été excitée par un souverain qui montrait plus d’ardeur qu’elle-même à venger les humiliations et les pertes qu'elle avait éprouvées dans la dernière guerre ; c'était lempereur de Russie, Pauller. Le caractère tout à-la-fois bizarre, som bre et généreux de ce monarque, devint la cause des plus grands événemens. Dans la cour voluptueuse de sa mère, il avait montré une tristesse qui semblait un continuel reproche du meurtre de l’infortuné Pierre III, son père. Habitué à méditer sur cette catastrophe, il ne put régner sans la craindre

our lui-même; mais il craignait encore plus les principes de la révolution française. Soit qu'ayant été appelé à contempler l'éclat de la cour de France, où tout brillait de jeunesse et de grâces, il éprouvât une pitié plus profonde pour les malheurs qui alors étaient si loin de sa pensée, soit que les principes du gouvernement absolu dans lesquels il avait été élevé eussent pris chez lui toute la force d’une croyance religieuse, il ressentait comme des injures personnelles les outra-

es faits aux rois ses contemporains. Ainsi que son père, il portait dans l’amour de la gloire tous les signes d’une manie quelquefois ridicule. Si l’un avait été frappé d’une sorte de vertige pour la tactique prussienne , l’autre était travaillé d'un vain désir de rétablir la chevalerie. La nature ne lui avait donné cependant ni la grâce ni la dextérité qui se lient dans notre imagination avec les anciens chevaliers; il en avait du moins la loyauté.

Il fut aisé au gouvernement anglais de le séduire, en lui protestant que désormais de vains intérêts d’ambition ou de cupidité ne le distrairaient plus de la cause générale. Il s’y voua tout entier; ne demanda point quelle province, quels nouveaux avantages il obtiendrait en dédommagement des énormes dépenses qu’il allait faire et du sang de ses sujets qu'il allait prodiguer ; il ne voulait que la gloire pour salaire. Catherine II avait laissé ses armées sur un pied respectable. La guerre contre la Turquie, et celle même contre la Pologne, les avaient exercées, et avaient formé quelques gé-