Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

EXÉCUTIF. 175

une plus grande ignominie. Mais sa destinée était d'être la fable de l'armée et l’idole des cabinets.

La nouvelle de cet armistice fit naître à Naples un des plus horribles tumultes dont l’histoire fasse mention. Deux partis y étaient en présence ; l’un composé de familles nobles et opulentes qui aspiraient à la liberté; l’autre composé de cette classe du peuple qui , sous le nom de Lazzaroni, rend le gouvernement et les citoyens tributaires de son insolente et sauvage fénéantise. Ils avaient une vive affection pour un roi dont le plus grand bonheur et le premier penchant étaient de prendre part à leurs plaisirs ignobles. Jamais plus grande popularité n’avait demandé moins de frais à la politique. Ce n’était pas seulement le roi, c'était l'homme qui s’oubliait avec eux. Les Napolitains les plus distingués rougissaient de cette abjection du monarque; ils avaient conçu la haîne la plus profonde pour la reine, dont j'ai déjà annoncé le caractère. Dans tous les mouvemens que la révolution française fit naître chez d’autres peuples, on n’avait point à se venger d’une oppression cruelle. Le prince d'Orange avait plusieurs qualités dignes de ses aïeux, Le sénat de Venise amusait ses sujets ; celui de Berne les rent dait heureux. Pie VI joignait aux qualités les plus aimables d’un souverain la piété et la bienfaisance. CharlesAmédée , que nous verrons tout à l'heure précipité du trône du Piémont, avait une austère décence; et pour remonter jusqu’à notre révolution, mobile de toutes celles-là , qui jamais eut plus de vertus domestiques que Louis XVI? La passion de la liberté avait tout fait, et ces princes s’étaient trouvés engagés dans des situations plus fortes que leur caractère. Il n’en était pas ainsi à la cour de Naples. La reine était hautaine, absolue ; elle se jouait des lois, et même des mœurs ; elle était fougueuse dans ses caprices, et implacable dans ses vengeances. Les nobles la détestaient: ils se réjouissaient de ses revers, de sa chute prochaine; et, pour l’accélérer, plusieurs d'entre eux-avaient des intelligences avec les Français.

Telles étaient les dispositions des esprits à Naples, lorsqu’un ordonnateur de l’armée française, d'Arcambald, vint avec un sauf-conduit dans cette capitale pour y demander le paiement d’une somme de dix millions promise par l’armistice. Dès que le peuple est instruit de l’objet de sa mission , il s’indigne , il maudit le général Mack, qui a souscrit à ces conditions infâmes; il se précipite sur le Français. On parle de le massacrer. Les partisans de la libenté accourent à sa défense ; le choc s’engage ; le Francais est délivré. Un Lazzarone meurt percé de coups. Nous (le vengerons ,