Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

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s’écrient ses camarades. Ils inondent toutes les places , ils

énètrent dans tous les palais, ils se chargent de butin et d’armes ; l'anarchie est au comble. Le roi, la reine et la cour se retirent en Sicile. Les Lazzaroni ne murmurent point . de cette fuite, qui semble leur permettre les plus grands excès. Ils parlent de mourir pour un roi qui se sauve : Mack est un traitre , disent-ils, nous voulons sa téte. Ils accusent les soldats de jacobinisme et de lâcheté. Ce dernier grief était le mieux fondé. Quelques-uns se mêlent à ces bandes effrénées et en augmentent la rage ; d’autres désertent sous la conduite de leur général même. Mack se présente au camp des Français ; il vient demander un asile au général Cham-

ionnet ; il lui remet son épée, magnifique présent que lui a fait le roi d'Angleterre , et que le Français refuse. On lui donne une escorte pour le conduire à Milan. Le directoire de France le considérera comme un prisonnier de guerre, et le fera garder comme un prisonnier dangereux. Mais déjà le camp français est assailli par les Lazzaroni armés, qui poursuivent Mack et les déserteurs. Ils insultent les premiers postes. On les fusille, on les disperse.

Le général francais veut profiter de ce désordre , qui a rompu l’armistice, pour faire la conquête de Naples. Tous les habitans de cette ville, qu'il a su gagner à sa cause, l'implorent comme un libérateur. S'il tarde , ils ont tout à craindre des fureurs de la multitude ; ils seront eux-mêmes de puissans auxiliaires. Ils se sont ménagé des intelligences dans le fort Saint-Elme. Déjà ils en sont maîtres. Les Français s'emparent de toutes les hauteurs qui dominent la ville; ils y amènent une nombreuse artillerie pour Ja foudroyer. Cependant Championnet hésite avant de donner le signal de l'assaut, que tous les soldats lui demandent ; il prévoit le massacre affreux qui va commencer. Il envoie un parlementaire dans la ville, mais toute l'autorité a passé dans les mains des chefs des Lazzaroni, on tire sur le parlementaire. À l'assaut, s’écrie le général francais. On est aux portes de Naples. Soixante mille Lazzaroni les défendent. L’artillérie des Français ouvre leurs rangs. ils rentrent dans la ville, mais toujours acharnés à combattre. Les Français les y poursuivent. Chaque soldat porte le fer d’une main et une torche embrasée de l’autre. Ici ce sont des masses de Lazzaroni qui s'opposent à leur passage, et qui se font une barrière des cadavres amoncélés de leurs compagnons ; là, c’est du haut des toits que les Lazzaroni font pleuvoir sur eux tout ce qui s'offre à leurs mains. Les Français portent l'incendie dans tous les édifices qui leur servent de retraite ; on massacre dans toutes les rues, on pille dans tous les palais :