Charles de Butré 1724-1805 : un physiocrate tourangeau en Alsace et dans le margraviat de Bade : d'après ses papiers inedits avec de nombreux extraits de sa correspondence...

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dont les temps malheureux, qui se sont passés, ne m’ont pas fait oublier le souvenir flatteur.

« Comme je ne vis plus qu'avec des arbres, je ne vous paraîtrai pas bien intéressant, mais les hommes, mes frères, bons ou mauvais, ne pouvant exister sans subsistances, il faut bien leur en procurer. C’est pourquoi je viens de recommencer mes travaux ordinaires dans ce temps-ci et de planter un demi-millier d'arbres, le mois passé, à sept lieues d'ici, dans les montagnes.' C’est peu, et seulement pour dire que je n’ai pas passé une année infructueusement. La saison n'étant plus favorable et décembre étant le temps du repos, je suis rentré dans ma retraite de Strasbourg, au milieu de six jardins qui sont mon unique société et jy passerai l'hiver. Il faut espérer qu'au printemps on pourra aller librement et s'occuper paisiblement de tous les travaux utiles. Personne au monde ne le désire avec tant d’ardeur et c’est cette douce espérance qui fait toute ma félicité.

« Me voyant séquestré à Paris, en 1793, je cherchaï à m'occuper de l’objet de mon étude depuis plus de 50 ans, pourquoi je fus visiter les plus beaux jardins de cette ville. Je trouvai partout des espaliers de pêches dans un horrible état. Quelques-uns cependant n’étant pas tout-à-fait perdus, et les propriétaires m’accueillant avec le plus grand intérêt, je m'occupai à les rétablir, mais pour contribuer au bien général, il fallait une instruction qui n’existait point encore dans les volumineux traités imprimés jusqu’à ce jour.

« C’est pourquoi je fis imprimer une petite brochure sur la taille des arbres fruitiers et surtout sur celle des pêches. Pour lors je fus visité par quantité de propriétaires, me priant de venir voir leurs jardins. J'ai mis la serpette à la main à plusieurs et j'ai procuré aux autres des gens de Montreuil

* Ce sont les plantations de Haslach dont nous parlerons tout à Vheure,