Charles de Butré 1724-1805 : un physiocrate tourangeau en Alsace et dans le margraviat de Bade : d'après ses papiers inedits avec de nombreux extraits de sa correspondence...

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des pêchers qui sont dans un mauvais état depuis six ans que je ne les avais pas vus. C’est un travail immense; aussi je ne vous verrai pas avant la Saint-Jean, car il faut que je remette cet immense jardin un peu en ordre, ce qui n’est pas une petite besogne.

« Je n’ai perdu que ce que j'avais à Carlsruhe, excepté mes livres qu’on m'a conservé. Pour ici, j'ai trouvé tous mes habits et petits ustensiles de ménage et beaucoup de livres, et mon cabriolet. Ainsi j'ai encore quelque chose .... Recevez les assurances de ma sincère amitié.

« BUTRET. »

Le fervent horticulteur resta en eftet plus de deux mois à Ettlingen, comme il le racontera dans une lettre subséquente, travaillant du soir au matin « à réparer des ans l’irréparable outrage» dans ses pépinières négligées, et faisant «crier au miracle » — c'est du moins lui qui l’affirme — les bons citadins qui venaient suivre en badaudant ses travaux. Mais tout son zèle et son talent ne devaient pas amener une réintégration dans sa situation officielle. Le massacre des plénipotentiaires de Rastatt, la reprise de la lutte entre la République française et la coalition de l'Europe, y fut sans doute pour quelque chose. Puis il y avait pour le margrave, d’autres dépenses à faire, plus urgentes, il faut l'avouer, que d’ajouter encore de nouveaux arbres à tous ceux qui se trouvaient déjà dans ce château d’un si coûteux entretien. Peut-être Charles-Frédéric songeait-il dès lors à le transformer en hôpital, comme il l'ordonna quelques années plus tard. Bref, Butré dut revenir à Strasbourg, sans que ses vœux se fussent réalisés, ou parussent près de l’être.

Il ne se tenait pas néanmoins pour battu. Le 7 avril 1799, il adressait une nouvelle lettre à Mme de Hochberg, profitant d’un incident désagréable qui s’était produit entre le majordome d'Ettlingen et lui.