Du role des légistes dans la Révolution : discours prononcé à l'audience solennelle de rentrée la 3 novembre 1880
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A cette question de l'égalité de partage dans les suc-
cessions ab intestat, Mirabeau rattachait cette autre question non moins importante de la liberté du droit de tester.
« La loi doit-elle admettre chez nous la libre disposition des biens en ligne directe? C'est-à-dire un père ou une mère, un aïeul ou une aïeule doivent-ils avoir le droit de disposer à leur gré de leur fortune, par contrat ou par testament, et d'établir ainsi l'inégalité dans la possession des biens domestiques? C’est ce que je me propose d'examiner. »
Ainsi parlait Mirabeau. Et la question posée dans ces
” termes précis, il continuait en reconnaissant que si les hommes ont professé de tout temps un saint respect pour la volonté des morts; si le vœu des mourants doit être une loi pour ceux qui survivent, cependant ce vœu
des limites, et «les droits de l’homme, en fait de propriété, ne peuvent s'étendre au-delà de son existence. »
Mirabeau ajoutait :
« La société, sans doute, a droit aussi de demander à ses législateurs qu’ils ne la privent plus des membres utiles que les lois testamentaires lui ont enlevé jusqu'à ce jour. Pourquoi, peut-elle leur dire, consacreriezvous à l’oisiveté, au dérèglement, (ce qui est souvent la même chose), ces privilégiés des familles qui se croient, par leur fortune, faits uniquement pour les plaisirs? Pourquoi, pour favoriser un mariage qui ne fiatte souvent qu'un vain orgueil, en empêcheriezvous plusieurs qui pourraient être fortunés? Pourquoi condamneriez-vous au célibat plusieurs enfants de la même famille, en faisant dévorer par un seul d’entre eux l'établissement de tous les autres? Pourquoi surtout ces filles tendres, sensibles, dont les égards