Du role des légistes dans la Révolution : discours prononcé à l'audience solennelle de rentrée la 3 novembre 1880

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Durand de Maillane et les légistes de la Constituante répondirent : le mariage est un contrat sanctionné par la loi. Et l’art. 17 du titre II de la Constitution de 1791 consacra cette juste interprétation.

L'Assemblée Législative compléta cette réforme de la Constituante. Nous le verrons bientôt, lorsque j'aurai à vous parler du décret du 20 septembre 1792, sur le nouveau mode de constater les actes de l’état civil.

Il est difficile de comprendre, Messieurs, qu’une réforme si nécessaire et si respectueuse des droits de la conscience individuelle, ait pu et puisse soulever des critiques aussi sévères que celles dont nous sommes encore les témoins. On a demandé l’abrogation des articles 199 et 200 du Code pénal, en considérant « comme une nécessité et au nom de la liberté des « consciences, que le mariage religieux puisse précéder « le mariage civil » (1).

Cette modification n’est pas près de s'opérer. Ne détruirait-elle pas toute l’économie des lois de la Révolution qui ont préparé le texte définitif du Code civil? Ne serait-elle pas pas opposée à l'esprit de ces dispositions législatives et ne contredirait-elle pas ce qu'ont voulu les légistes : l'indépendance du pouvoir laïque vis-à-vis du pouvoir ecclésiastique ? En quoi le mariage civil menace-t-il les droits de quelqu'un ? En quoi peut-il troubler la conscience d’un citoyen ? N’estil pas un contrat et, suivant l'expression de Pothier, n'est-il pas « la matière du Sacrement », c’est-à-dire préexistant et nécessaire ?

On objecte que le mari, après la célébration du mariage civil, peut refuser à sa jeune épouse de faire consacrer les liens que la loi a déjà noués par la célé-

(1) V. Lucien Brun. — Introduction à l'étude du droit, — Pag. 150.